Employés à haut potentiel : comprendre ces talents pour mieux les valoriser

22-09-2025
Thématiques : Gestion de la diversité  -  Article informationnel
Avoir des aptitudes qui dépassent les attentes peut rarement être perçu comme étant problématique. Toutefois, l’intégration des personnes à haut potentiel peut représenter un défi.
Karine Dutemple

Auteur.e

Karine Dutemple, rédactrice
chez Pratiques RH

employés à haut potentiel

Comment peut-on identifier les salarié.e.s à haut potentiel et les soutenir dans leur épanouissement professionnel ?

Identifier les employés à haut potentiel

France Gravelle, professeure-chercheuse titulaire en gestion de l'éducation et nouvelle gouvernance à l’UQAM, souligne que plusieurs signes peuvent laisser croire qu’un.e salarié.e est un.e personne à haut potentiel.

« Lorsqu’on leur donne un dossier avec échéance, il va souvent être remis bien avant », donne-t-elle en exemple. L’employé.e va avoir une façon bien à lui ou à elle de mener à terme ses projets et offrir un résultat « hors de la norme ».

Un employeur qui se doute de la présence de cette caractéristique singulière chez un individu devrait lui en parler et l’encourager à passer des tests psychométriques, souligne la spécialiste.

Sabrina Gendron-Fontaine, conseillère d’orientation et formatrice spécialisée auprès de la clientèle à haut potentiel précise que c’est une évaluation en neuropsychologie qui permettra de confirmer le haut potentiel, d’où l’importance d’encourager cette démarche.

Un esprit stratégique aiguisé et de la créativité

« Ce sont des personnes qui vont avoir un engagement très fort par rapport à leur rôle et leurs tâches », poursuit-t-elle.

Ces employé.e.s vont également faire preuve d’une très grande créativité dans l’exercice de leurs fonctions, proposant des idées à la fois originales et novatrices.

De surcroît, leur capacité à déceler les incohérences dans une optique d’améliorer l’efficacité des processus et leur grand besoin de stimulation intellectuelle sont des caractéristiques dignes de mention.

Leur capacité à avoir une vue d’ensemble sur l’entreprise et leur esprit stratégique peuvent les amener à « faire des liens rapidement entre différents aspects qui pourraient avoir un impact l’un sur l’autre dans le futur ».

« Plusieurs de mes client.e.s prédisent assez facilement les événements, de même que les liens entre ceux-ci et peuvent anticiper comment certaines situations vont évoluer », explique-t-elle.

Une meilleure compréhension pour une meilleure intégration

S’il importe de savoir identifier ces employé.e.s, encore faut-il encourager une meilleure compréhension de la neurodivergence et des besoins de cette clientèle pour favoriser son épanouissement professionnel, est d’avis Sabrina Gendron-Fontaine.

« Il faut se questionner : est-ce qu’on a une structure et une procédure d’accueil et d’intégration qui est inclusive, de la neurodiversité ? » 

- Sabrina Gendron-Fontaine, conseillère d’orientation et formatrice spécialisée auprès de la clientèle à haut potentiel 

Une réelle réflexion sur le sujet s’impose, d’autant plus que plusieurs employé.e.s ne vont pas nécessairement aborder ce sujet avec leur gestionnaire ou bien lors d’une entrevue d’embauche, mentionne l’experte.

Comprendre les particularités des personnes à haut potentiel, c’est également s’outiller pour les aider à affronter les difficultés auxquelles elles peuvent faire face. « Il est important que les employeurs soient informés », insiste France Gravelle.

La collaboration et le rapport à l’autorité

Sabrina Gendron-Fontaine suggère que la collaboration peut constituer un enjeu. « Leur rythme de pensée est plus rapide que la moyenne. Cela peut les amener à prendre des initiatives sans considérer l’opinion et les suggestions des collègues », relève-t-elle.

Leur manque de tolérance envers des pairs qui ne travaillent pas au même rythme peut aussi être un facteur problématique, lequel peut nécessiter une intervention de la part de l’employeur.

Le rapport à l’autorité peut également s’avérer conflictuel, met de l’avant l’experte. Si un manque de transparence les laisse dans le questionnement par rapport aux raisons qui ont motivé une décision, la frustration peut rapidement s’installer.

Les décisions doivent être expliquées clairement et les incohérences évitées, précisant que les décisions annoncées doivent laisser place à l’action.

Favoriser l’engagement et l’ouverture aux nouvelles idées

L’experte en neurodivergence met de l’avant la tendance des salarié.e.s à haut potentiel à remettre en question les procédures mises en place et la façon dont les décisions sont prises.

Dans un mode de gestion plus autocratique où il est plus difficile de le faire, ces employé.e.s peuvent se placer en opposition, souligne Sabrina Gendron-Fontaine.

Voilà pourquoi un mode de gestion plus participatif correspond mieux à leur type de personnalité. Cela leur permet également de mettre à profit « leur capacité à résoudre des problèmes complexes et optimiser des processus, tout en répondant à leur besoin de dépasser le cadre de leur propre rôle ».

Pour la spécialiste, cela reflète aussi leur soif de compréhension et d’autonomie. Avoir une relation de confiance avec leur gestionnaire est certainement indispensable à leur épanouissement professionnel.

« Il faut s’intéresser à ce qu’elles ont à dire et adopter une posture d’ouverture face aux nouvelles idées », affirme-t-elle. Cela peut notamment se concrétiser en encourageant les séances de remue-méninges, lesquelles sont particulièrement appréciées de la part des salarié.e.s à haut potentiel.

La nécessité des nouveaux défis pour contrer l’ennui

La spécialiste précise que les personnes à haut potentiel intellectuel ne vont pas nécessairement avoir de difficultés majeures d’intégration dans un milieu de travail.

« C’est plutôt le maintien en emploi qui pose problème », soutient-elle. L’experte rappelle que ces employé.e.s sont allergiques à l’ennui et donc, toujours à la recherche de stimulation intellectuelle.

Un.e salarié.e à haut potentiel intellectuel pourra ainsi s’épanouir dans un poste où il y a de l’apprentissage continu, un rythme plus rapide de travail, des tâches variées et une certaine complexité quant à la nature du travail à effectuer, explique l’experte.

France Gravelle abonde dans le même sens, réitérant que ce sont des gens très curieux et qu’ils veulent toujours apprendre. Pour cette raison, offrir de la formation continue peut être une façon efficace de maintenir leur intérêt.

Favoriser le maintien en emploi des personnes à haut potentiel

  • Faire preuve d’ouverture face aux idées soulevées et aux initiatives proposées
  • Favoriser l’autonomie au travail
  • Offrir de la formation continue ou des possibilités d’avancement
  • Donner des opportunités de relever de nouveaux défis
  • Miser sur une gestion participative

Si le poste qu’occupe l’employé.e se caractérise par du travail répétitif et que l’évolution des tâches est plus difficile à mettre en place, favoriser l’avancement de la personne dans la même entreprise est une avenue à envisager, suggère Sabrina Gendron-Fontaine.

Ce sont des individus qui ont besoin de défis et de nouveaux dossiers, la monotonie les amenant souvent à changer d’emploi ou bien à vouloir décrocher, poursuit Mme Gravelle.

L'épuisement professionnel : un risque à ne pas sous-estimer pour les employés à haut potentiel

Pour France Gravelle, cette caractéristique peut conduire les salarié.e.s à vivre de l’épuisement professionnel. Sabrina Gendron-Fontaine abonde dans le même sens, réitérant l’étroite relation qui existe entre l’ennui au travail et cette problématique.

La suractivité mentale constitue un autre facteur de risque, mentionne Mme Gravelle. Celle-ci suscite des pensées et des réflexions ininterrompues ainsi qu’une tendance à vouloir prendre sur ses épaules une imposante charge de travail.

Sabrina Gendron-Fontaine rappelle l’importance d’agir en prévention pour contrer cette problématique et d’être sensible aux signaux d’alerte : un détachement face aux tâches à effectuer et à l’égard des collègues, de même qu’une baisse de la productivité, créant une situation de sous-performance.

« Il faut être capable d’avoir des discussions courageuses au sujet de l’épuisement professionnel et faire preuve de transparence dans la discussion. » 

- France Gravelle, professeure-chercheuse titulaire en gestion de l'éducation et nouvelle gouvernance à l’UQAM

Dans une étude menée en 2019 par Yann-Gaël Jaffré, Laurence Dulon et Steven Verbeek et intitulée Travail, emploi et douance, les auteurs parlent d’une « surexposition aux risques psychosociaux et d’une sensibilité accrue aux conditions de travail et d’emploi ». 

Saviez-vous que...

Selon une enquête de la Banque du Canada, 55 % des employé.e.s à haut potentiel au Québec envisagent de quitter leur emploi en cas d’insatisfaction face à leur travail.

Les raisons invoquées sont les suivantes :

  • Un manque d’autonomie dans l’exercice de leurs fonctions (63 %)
  • Une rigidité organisationnelle (68 %)
  • Un manque de défis intellectuels (72 %)

Source : Les employés hautement intelligents : un atout sous-estimé et mal géré par les organisations

« Ce qui est très important pour ces employé.e.s, c’est le sens qu’ils et elles accordent à leur travail », précise Sabrina Gendron-Fontaine. L’experte suggère de les questionner directement à ce sujet afin de prendre le pouls de leur satisfaction face à leur travail.

De surcroît, l’experte insiste sur l’importance de cultiver un espace de confiance, de sécurité psychologique et d’écoute afin de discuter de l’épuisement professionnel.

« Au-delà des rencontres pour en discuter, c’est une mentalité, puis une culture d’ouverture qu’il faut instaurer », ajoute-t-elle.

Des besoins considérés pour une réussite assurée

Un.e employé.e à haut potentiel peut contribuer à faire briller de nombreux projets, être la source d’idées novatrices et apporter des solutions astucieuses aux problématiques rencontrées en entreprise.

Toutefois, il faut garder en tête que la prise en compte des particularités souvent méconnues de ces talents est essentielle à leur épanouissement professionnel, lui-même moteur du succès de l’entreprise qui l’emploie !