Quel style de leadership pour quelle équipe ?

24-10-2025
Thématiques : Compétences en gestion et leadership  -  Article informationnel
Et si la véritable force d’un.e gestionnaire ne résidait pas dans un style unique, mais dans sa capacité à en changer ? L’efficacité du leadership se joue dans l’adaptation : savoir quand diriger, quand accompagner et quand inspirer.
Élodie Leman

Auteur.e

Élodie Leman, rédactrice
chez Pratiques RH

Une équipe diversifiée de jeunes professionnels, dont un homme en fauteuil roulant, collabore et discute de stratégies commerciales, d’analyses de marché et de planification de projets dans un cadre de bureau moderne.

Transformationnel, transactionnel, directif ou collaboratif : chaque style de leadership a ses forces... et ses limites. Leur efficacité dépend surtout du contexte et de la maturité de l’équipe.  

« Chaque personne a son style naturel, qu’elle peut développer ou moduler avec la formation et l’expérience », explique Marie-Hélène Gilbert,  professeure en gestion des ressources humaines à l’Université de Laval. L’enjeu n’est pas de chercher le meilleur style en soi, mais de savoir ajuster son approche en fonction des personnes et des situations. 

Identifier son style naturel : une base incontournable

Avant d’adapter une approche de leadership, encore faut-il savoir d’où l’on part.  

Les 5 styles de leadership

  • Transformationnel : inspire, motive, crée une vision commune et pousse son équipe à se dépasser. Il valorise le développement des membres de l'équipe.
  • Transactionnel : fixe des attentes claires, récompense ou sanctionne selon les résultats. Utile pour la clarté des rôles, moins pour l’innovation.
  • Directif / autoritaire : prend les décisions seul.e, impose les consignes et demande de la conformité. Pertinent en situation d’urgence, mais peut freiner l’initiative.
  • Collaboratif / participatif : implique l’équipe dans la prise de décision, favorise l’écoute et la concertation. Renforce l’engagement et la confiance.
  • Coach / développement : agit comme mentor, accompagne la progression, donne du feedback et encourage l’autonomie.  

Sources

  1. Asana – Les styles de leadership
  2. Indeed – Types de leadership
  3. DigitalRecruiters – Les différents styles de leadership
  4. GoExperts – 11 types de leadership à connaître

Le leadership commence par soi : intention, posture et conscience de ses forces

Connaître son style ne suffit pas. L’efficacité du leadership repose sur trois leviers : l’intention qui guide l’action, le langage qui structure la relation et le courage qui légitime le rôle du leader. 

Connaître son style naturel pour orienter ses décisions

« L’outil principal du gestionnaire, c’est lui.elle-même. Plus la personne se connaît, plus elle peut ajuster ses décisions et ses comportements », explique Marie-Hélène Gilbert.  

«  Il est possible de tester de nouveaux comportements, faire des petits pas vers un style plus participatif par exemple. Le coaching de gestion aide beaucoup à développer cette conscience de soi. »

- Marie-Hélène Gilbert

Une étude québécoise (2018) démontre que des traits comme l’extraversion ou la persuasion sont fréquemment associés aux styles transformationnel et transactionnel, confirmant l’influence de la personnalité sur la posture de leadership adoptée.  

L’intention comme boussole du leadership

C’est l’intention qui donne sens au leadership. Une même posture peut être perçue comme mobilisatrice ou autoritaire selon ce qui la motive. 

Hélène Douville, Formatrice et Coach d’affaires chez Groupe Conseil DCA, explique que « les décisions prises sans intention claire mènent souvent à des comportements incohérents ».  

Les travaux de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) identifient cette dimension comme un pilier du leadership authentique, où la cohérence entre les valeurs personnelles et les actions est un facteur déterminant de crédibilité et d’engagement des équipes. 

« Les évaluations de potentiel sont très utiles pour identifier ses zones d’amélioration. La rétroaction des équipes est tout aussi essentielle », ajoute Marie-Hélène Gilbert. 

Le langage comme outil de leadership

L’agilité de leadership se manifeste aussi à travers le langage utilisé quotidiennement. Les mots choisis traduisent la posture du.de la leader et influencent directement le climat relationnel. 

« Le mot "hésiter" est le plus stagnant de la langue française. Si je dis : n’hésite pas à venir me voir, l’employé.e ne viendra pas », illustre Hélène Douville. À l’inverse, dire « viens me voir quand tu veux » crée un espace d’ouverture réelle. 

Choisir ses mots avec soin clarifie les attentes, encourage la participation et renforce la confiance — des piliers du leadership authentique selon l’IRÉC

Le courage comme ancrage de la légitimité

Le leadership n’est pas qu’une question de posture relationnelle : il suppose également une capacité à faire face à l’incertitude, à assumer des décisions difficiles et à accepter la remise en question. 

« Pour être un.e bon.ne leader, il faut une bonne dose de courage. Le courage d’accepter les changements, le courage d’annoncer une mauvaise nouvelle, le courage de se remettre en question », affirme Hélène Douville. 

« Un leader est avant tout un influenceur dans une organisation. La vraie question, c’est : combien de personnes vous suivraient si demain matin vous n’occupiez plus ce poste ? », souligne Hélène Douville. La légitimité découle moins du poste que de la cohérence personnelle et de la confiance inspirée à l’équipe. 

Adapter le leadership selon les équipes

En effet, le leadership n’est jamais neutre. Il façonne le climat de travail et agit directement sur la motivation, la santé psychologique et la fidélisation du personnel.  

Si chaque gestionnaire possède un style naturel, il.elle ne peut s’y limiter, assurent les spécialistes. L’efficacité du leadership repose sur la capacité à ajuster son approche selon le niveau d’autonomie et d’expérience de l’équipe. 

L’approche situationnelle

« Le leadership situationnel consiste à ajuster son style en fonction de la maturité et des besoins de chaque personne », précise Marie-Hélène Gilbert. Le besoin d’autonomie varie selon les personnes : trop de latitude crée de l’insécurité chez certains, tandis qu’un cadre trop rigide freine les plus autonomes.  

Une recherche qualitative menée à l’UQAC en 2021 auprès de dirigeant.e.s de PME québécoises montre que la combinaison des styles transactionnel et du transformationnel contribue à améliorer la performance organisationnelle.  

Ces résultats rejoignent l’idée que les styles de leadership sont complémentaires et qu’un.e bon.ne chef.fe doit savoir naviguer entre plusieurs approches ! 

L’ouverture encadrée

La disponibilité et l’ouverture sont des qualités attendues des gestionnaires, mais elles doivent être balisées pour demeurer efficaces. 

«  Un.e leader doit être ouvert.e, mais pas à outrance. L’ouverture doit être encadrée. »

- Hélène Douville

Poser les bonnes questions devient alors un outil essentiel pour maintenir une relation saine avec son équipe.  

« Un.e bon.ne leader, c’est quelqu’un qui se rapproche de son équipe et qui ose demander : c’est quoi tes attentes par rapport à moi ? Qu’est-ce qui est non négociable dans notre relation ? », fait valoir Hélène Douville. 

Quel style pour quelle situation ?

Selon les besoins de l’équipe et les circonstances, certaines approches se révèlent plus efficaces que d’autres. 

En contexte de crise : directif d’abord, puis transformationnel

Les situations de crise exigent des décisions rapides. Dans ces moments, un style directif peut s’avérer efficace pour donner des consignes claires et assurer une réaction immédiate. Mais ce type de leadership ne peut pas durer. 

« En crise, on a besoin de directif au début, mais très vite il faut basculer vers du transformationnel pour donner du sens », souligne Marie-Hélène Gilbert. Elle rappelle que la mobilisation ne peut se maintenir sans une vision et une orientation qui dépassent la simple urgence. 

Les recherches le confirment. Une étude de l’UQAM (2018) montre que le leadership transformationnel, combiné à des valeurs humanistes, exerce un effet positif direct sur l’identification organisationnelle et l’attachement psychologique des employé.e.s.  

Dans un contexte de crise prolongée, ce style devient essentiel pour maintenir l’engagement. 

Pour des équipes jeunes ou en développement : le coach et le collaboratif

Les équipes en apprentissage ou issues des nouvelles générations privilégient la participation et la reconnaissance, rendant les styles collaboratif et coach particulièrement adaptés. 

«  Un.e bon.ne leader demande conseil, pas un service. La nuance est énorme : demander un conseil, c’est reconnaître la valeur de l’autre. »

- Hélène Douville

Les nouvelles générations souhaitent être consultées et participer davantage aux décisions. « On observe de plus en plus de leadership collaboratif ou participatif, qui répond aux attentes des nouvelles générations de s’impliquer », observe Marie-Hélène Gilbert. 

Le secteur public illustre également bien ces défis. Une analyse du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (2012) souligne que le leadership collaboratif représente un levier de transformation.  

Selon cette même étude MSSS (Enjeu 9, 2012), seuls 16 % des cadres adoptent réellement un style collaboratif, freiné par des barrières comme la soif de pouvoir, l’arrogance, la peur ou un ego surdimensionné. 

Dans des environnements stables et normés : le transactionnel

Dans les environnements très structurés, le leadership transactionnel demeure efficace pour assurer la clarté et le suivi des objectifs.  

« Le leadership transactionnel est nécessaire pour atteindre les objectifs, mais ce n’est pas suffisant lorsqu’on parle de motivation ou de dimensions humaines », rappelle Marie-Hélène Gilbert. 

Les risques des styles figés

Lorsqu’un.e gestionnaire ou une direction s’enferme dans un style unique, les effets négatifs ne tardent pas à se faire sentir, affirment les expertes interrogées 

« Les gestionnaires rigides perdent leurs équipes de travail et ne comprennent pas pourquoi », constate Hélène Douville. 

Marie-Hélène Gilbert souligne également les limites du directif : « Le style directif, c’est celui qui est le plus utilisé. Il peut être utile en contexte de crise, mais à moyen et long terme, il démobilise, crée de la résistance et entraîne souvent de la micro-gestion. » 

Les recherches appuient ces constats : une étude de l’UQAM menée en 2019 auprès de conseillers financiers du Mouvement Desjardins a montré que le leadership transactionnel avait des effets négatifs sur la qualité du service client (Archipel UQAM). 

Développer son agilité de leadership

Puisqu’aucun style ne fonctionne en tout temps, il demeure important de cultiver son agilité en s’appuyant à la fois sur l’apprentissage, la rétroaction et l’expérimentation. 

Former et outiller les gestionnaires

« Plus un.e gestionnaire est capable d’ajuster son style, plus il.elle peut naviguer dans la complexité », souligne Marie-Hélène Gilbert. La formation et l’accompagnement permettent d’élargir cette palette de comportements et de gagner en flexibilité. 

Au Québec, plusieurs solutions existent pour développer ces compétences. Les employeurs peuvent notamment encourager leurs gestionnaires à participer à : 

  • des formations continues reconnues par l’Ordre des CRHA, qui couvrent le leadership, la mobilisation et la gestion de la performance (ordrecrha.org) ;
  • des programmes universitaires courts, comme Leadership Essentials à HEC Montréal, qui offrent des outils concrets pour renforcer la légitimité et la mobilisation (executive-education.hec.ca) ;
  • des formations spécialisées en posture de leader-coach, pour développer une approche centrée sur les personnes (coaching.qc.ca) ;
  • des plateformes de perfectionnement, comme l’Espace Formation de l’Ordre des CRHA, qui regroupe une variété d’activités adaptées aux gestionnaires ;
  • des cours collégiaux pratiques, comme la Formation Gestionnaires efficaces au Cégep Mont-Petit, axée sur le leadership mobilisateur et l’influence positive (fc.cegepmontpetit.ca). 

Former et soutenir ses gestionnaires est essentiel au développement des personnes et des équipes. 

Aucun style n’est universel : chaque contexte exige une approche spécifique. « Il n’y a pas un style qui fonctionne tout le temps », rappelle Marie-Hélène Gilbert. L’efficacité repose sur la flexibilité, la cohérence et la capacité d’un.e chef.fe à ajuster son intention au bon moment.