Maîtriser l’art de déléguer : une efficacité accrue et des équipes autonomes

26-05-2025
Le temps est une denrée précieuse, nul besoin de le rappeler ! Il y a tant à faire durant une semaine de travail, que la nécessité de déléguer devient évidente pour gagner en efficacité.
Rédigé par :
Karine Dutemple, Pratiques RH
art de déléguer

En quoi consiste exactement une délégation efficace et quels sont les bénéfices de cette pratique pour les gestionnaires, mais aussi pour les équipes ?

La délégation pour une charge de travail plus équilibrée

Nicolas Aubert, accompagnateur en gestion chez LMI Canada, souligne que maîtriser l’art de déléguer est indispensable pour les gestionnaires qui souhaitent éviter une surcharge de travail et les conséquences qui en résultent.

« Les gestionnaires qui n’ont pas appris comment déléguer vont tout prendre sur leurs épaules et risquent de souffrir d’épuisement professionnel », affirme-t-il.

En gardant tout sous son contrôle et en devenant indispensable, le.la gestionnaire s’expose à un autre risque : celui d’avoir insuffisamment de temps à consacrer à ses propres tâches stratégiques, lesquelles sont au cœur même de son rôle. Souvent mobilisé.e par des urgences, il.elle se retrouve alors incapable d’atteindre ses objectifs personnels.  

« Plus un.e gestionnaire développe son équipe rapidement, plus il.elle a de temps à consacrer à des tâches stratégiques », soutient-il, mettant en évidence le gain en productivité qu’une bonne délégation permet de réaliser.

« La délégation est la clé de voûte de la productivité. »

- Nicolas Aubert, accompagnateur en gestion chez LMI Canada

Nathalie Bureau, formatrice et conférencière en gestion, abonde en ce sens. « Déléguer permet de s’enlever de la pression, mais aussi de récupérer du temps pour se concentrer sur ses tâches et développer son propre potentiel. »

Afin d'éviter de devenir un.e gestionnaire débordé.e, une bonne planification de la délégation est essentielle, selon Nicolas Aubert. Il faut commencer par brosser un portrait de l’ensemble des tâches effectuées, pour ensuite les classer en fonction de leur niveau de rendement.  

Ce dernier fait référence à leur capacité de contribuer à l’atteinte des objectifs du ou de la gestionnaire. « Le but avec les tâches qui ont un faible rendement sur l’atteinte des objectifs, c’est de les simplifier, de les éliminer ou de les déléguer », rappelle-t-il.

Déléguer : une source de motivation et de développement  

Déléguer n’est pas seulement bénéfique pour la personne en fonction de gestion dont la charge de travail est mieux équilibrée. Cela permet de renforcer l’estime du personnel, affirme M. Aubert.  

En effet, pour l’employé.e, se voir confier de nouvelles tâches et responsabilités est une preuve de confiance en ses compétences et la reconnaissance de son potentiel.

Cela se reflète sur le taux de rétention du personnel, insiste Mme Bureau. Miser sur le développement de compétences par le biais de la délégation est une façon « d’accrocher les gens avec le cordon du cœur », mentionne-t-elle. Elle rappelle que cette pratique doit s’appliquer de façon équitable afin que tous et toutes puissent en tirer profit.  

M. Aubert relève que la délégation participe également au développement des compétences des gestionnaires. « En ne déléguant pas certaines tâches, on se prive d’une opportunité de croissance pour notre équipe, mais aussi de la possibilité de développer ses propres compétences en formation de personnel. »  

« Le but ultime de la délégation, c’est d’avoir une équipe forte. »

- Nathalie Bureau, formatrice, conférencière et coach en gestion

Quand confier une tâche rime avec former

En déléguant, il faut nécessairement accepter que des erreurs soient commises, ces dernières faisant partie intégrante de tout processus d’apprentissage, comme l’explique M. Aubert.  

Si un suivi approprié est effectué auprès de l’employé.e, les erreurs commises ne seront pas majeures, précise Nathalie Bureau.

Si accorder de l’autonomie ouvre la voie aux erreurs formatrices, cela évite également un encadrement trop rigide et peu favorable à l’innovation, souligne la spécialiste. « En encadrant trop l’exécution de la tâche, la personne ne pourra pas s’épanouir et trouver une idée nouvelle. »

L’experte évoque que la personne à qui la tâche est confiée peut aussi trouver une façon plus efficace de l’effectuer. « Quand on délègue une tâche et que la personne a trouvé une méthode plus efficace, à moindre coût et que tout le monde adore son idée, il faut de l’humilité pour le reconnaître. »  

Non seulement la personne a découvert une nouvelle méthode de travail qui profitera à toute l’équipe, mais cela constitue également une source de motivation et de valorisation pour la personne qui pourra l’enseigner à ses collègues.  

De surcroît, l’apprentissage de nouvelles tâches est essentiel pour éviter l’ennui au travail et maintenir l’intérêt des individus à vouloir demeurer au sein de l’entreprise à long terme.

Offrir un soutien adapté au niveau d’autonomie

Si la décision est prise de déléguer une tâche, une réflexion s’impose concernant la meilleure personne pour l’accomplir : qui est capable de la prendre en charge dans l’équipe ?

Une fois l’individu désigné, il faut déterminer son niveau d’autonomie et de compétence par rapport à l’exécution de la tâche. Il sera alors possible d’offrir un soutien adapté aux besoins de l’apprenant.e.

Les niveaux d’autonomie et de compétence

  1. Niveau 1 : la personne a besoin de directives explicites pour chaque étape ;
  2. Niveau 2 : l’employé.e fait de petites tâches de façon autonome, mais demande une validation après chaque étape ;
  3. Niveau 3 : le.la salarié.e atteint les objectifs fixés pour la réalisation de la tâche et demande une validation occasionnellement ;
  4. Niveau 4 : la personne effectue toutes les tâches nécessaires à l’accomplissement du projet et demande une seule validation à la fin de celui-ci.

Nathalie Bureau met de l’avant l’impact d’un encadrement mal adapté aux besoins de l’apprenant.e.  

« Avec quelqu’un qui est débutant, un encadrement peu soutenu sera la cause de nombreuses erreurs, alors que l’inverse sera perçu comme un manque de confiance pour une personne experte », explique-t-elle.

Cette dernière situation est évoquée dans l’article SOS Managers où une gestionnaire en marketing relève les conséquences d’un encadrement inadapté aux besoins du personnel et la perception négative qui peut en résulter. Nouvellement en poste, l’experte en marketing devait déléguer les anciennes tâches dont elle était responsable aux personnes désormais sous sa supervision.

Témoignant du peu de marge de manœuvre laissée au personnel en raison de son besoin de contrôle, elle mentionne que celui-ci a perçu son attitude comme un manque de confiance.  

Consciente de cette situation, la gestionnaire a dû redéfinir son rôle auprès de l’équipe pour réajuster le tir.

« La responsabilité principale d’un.e gestionnaire, c’est d’amener toute l’équipe à devenir meilleure. »

- Nicolas Aubert, accompagnateur en gestion chez LMI Canada

« La pire erreur que peut faire le.la gestionnaire, c’est de confondre la délégation d’une tâche et son attribution », poursuit Nicolas Aubert. Si tel est le cas, cette personne ne va pas vérifier que les attentes sont bien comprises, ce qui peut entraîner une déception par rapport au résultat livré.

Si elle est trop optimiste par rapport à la capacité de l’employé.e de réaliser la tâche, elle pourrait commettre la même erreur et ne pas offrir l’encadrement nécessaire en fonction du degré de compétence de la personne.

Dans un cas comme dans l’autre, le ou la gestionnaire ressentira une perte de confiance en la capacité des membres de l’équipe à assumer de nouvelles responsabilités. Le personnel perdra une occasion d’être valorisé, entraînant une perte de motivation.  

Nathalie Bureau est sans équivoque : les suivis adaptés aux besoins et aux connaissances des apprenant.e.s feront toute la différence sur la réussite ou l’échec de la délégation.  

Le.la gestionnaire doit garder en tête que le but est toujours de soutenir la personne dans le développement de son autonomie, « ainsi que de l’amener à trouver les réponses à ses questionnements le plus possible de façon indépendante », précise M. Aubert.

La formation et l’encadrement : les clés d’une délégation réussie

Pour s’assurer que l’employé.e devienne de plus en plus autonome dans l’exécution des nouvelles tâches qui lui sont déléguées, le.la gestionnaire doit adopter une posture de formateur.trice, selon le spécialiste.  

Il est faux de croire que tout le monde apprend de la même façon, soutient le spécialiste. Certaines personnes sont auditives, alors que d’autres sont visuelles. Il faut donc tenir compte du mode d’apprentissage de chaque personne pour trouver un style de communication qui favorise la rétention de l’information.

« Certaines personnes apprennent de façon graduelle et ont besoin d’entendre la même information à plusieurs reprises, alors que ce n’est pas le cas pour d’autres », poursuit-il.

L’expert en formation réitère que le suivi est essentiel pour valider la compréhension de l’apprenant.e, plusieurs gestionnaires commettant l’erreur de présumer que tous leurs employé.e.s ont compris sans nécessairement s’en assurer.  

La délégation : une source d’épanouissement au travail

En assurant à tous et toutes la chance de développer de nouvelles compétences, la délégation est porteuse d’innovation et soutient la fidélisation de la main-d'œuvre.  

Si elle implique beaucoup plus que de simplement transférer une tâche d’une liste à une autre, l’effort qu’elle requiert n’est pas en vain !