Les trois piliers pour motiver les équipes en entreprise
Les spécialistes en ressources humaines interrogé.e.s par Pratiques RH, estiment que la motivation au travail est intimement liée à l’autonomie, au sentiment de compétence et à l’affiliation sociale des membres de l’équipe.
Si ces 3 besoins sont comblés, la motivation sera au rendez-vous.
1. L’autonomie au travail
C'est la capacité d’être en contrôle de ses actions, de faire des choix et d’exprimer ses opinions. « Ce n’est pas l’indépendance à tout crin ni le laisser-faire et encore moins : je fais ce que je veux, quand je veux. Il s’agit de faire des choix à l’intérieur de certaines règles et limites », illustre Jacques Forest, professeur au département d'organisation et ressources humaines de l'ESG UQAM.
Le rôle du gestionnaire ou superviseur
En soutenant l’autonomie de ses troupes, le gestionnaire répond ainsi à leurs besoins psychologiques. Cela procure de bons effets sur leur santé mentale et limite les dégâts liés à la détresse au travail.
À l’inverse, un.e superviseur.e contrôlant et négatif nuit grandement aux employé.e.s qui ressentent un sentiment de dévalorisation. « Je n’ai plus de marge de manœuvre : mon patron me dénigre et n’est jamais satisfait », soutient Hélène*(nom fictif), d’un ton découragé.
Souvent, les talents choisissent une firme et ses dirigeant.e.s pour leur réputation, leur notoriété. « En bout de ligne, les gens quittent parce que cela ne marche pas avec le patron ou parce qu’ils ou elles n’aiment pas la façon d’être traité.e.s », évoque pour sa part le conférencier et auteur, Marc-André Morel.
Aujourd’hui, les personnes en autorité en entreprise savent reconnaitre les forces du personnel. « C’est la clé pour créer une équipe engagée et motivée », ajoute Jacques Forest qui recommande aux entreprises un outil disponible en 41 langues mettant en perspective les points forts de chacun et chacune.
2. Le sentiment de compétence
Le sentiment de compétence est jumelé à l’efficacité et à l’obtention du succès dans l’exécution des tâches. Cela contribue également à recevoir de la considération de la part des client.e.s ou des pairs.
Condition essentielle : Si l’employeur communique bien ses attentes et son degré de satisfaction, tous et toutes auront envie de s’engager pleinement dans l’entreprise.
« Comme dirigeant.e d’entreprise, il faut voir notre écosystème comme quelque chose de vivant. Nos employé.e.s sont en train d’évoluer et d’acquérir des compétences et intérêts au sein de notre organisation. Les gens seront engagé.e.s parce qu’il y a de la place pour leur intelligence, leurs compétences », croit Julie Tremblay-Potvin, stratège culture organisationnelle et coach en leadership bienveillant chez De Saison.
Suggestions :
- Proposer des tâches stimulantes
- Donner une rétroaction positive, rapide et pertinente
- Développer les compétences du personnel en donnant des tâches en relation avec leurs talents intrinsèques
- Faire ressortir les indicateurs de progrès
3. L’affiliation sociale en entreprise
Enfin l’affiliation sociale, c’est le sentiment d’appartenance à l’entreprise qui se traduit par le soutien, la communication et la connexion aux autres. Les employé.e.s dont le besoin d’affiliation sociale est satisfait apprécient les collègues et ont des ami.e.s parmi le groupe.
Présidente et coach chez Mymosa &CO, Mylène Grégoire dit qu’avec la venue de la pandémie, plusieurs ont découvert un petit côté intéressant de l’isolement. « On en oublie les bienfaits de la proximité et la connexion avec les autres. La richesse des échanges permet d’apprendre, de s’entraider, d’ouvrir des portes, de cocréer et de créer un environnement sain où il fait bon travailler.»
Plusieurs études confirment combien le sentiment de camaraderie qui prévaut au sein d’une entreprise est un gage de bien-être, de satisfaction et de plaisir.
De plus en plus, les entreprises au Québec développent une culture axée sur le respect, la collaboration bienveillante, ainsi qu’une gestion saine de la performance qui favorise le bien-être personnel et professionnel. Ces nouveaux modèles se développent dans une multitude de sphères d’activités, observe de son côté Julie Tremblay-Potvin.
Le dicton est bien connu : qui se ressemble, s’assemble.
Au fil des rencontres virtuelles ou en présence, ces gens qui ont des valeurs communes travaillent ensemble à accélérer le développement de l’entreprise.
« L’assouvissement de ces trois besoins a des conséquences positives comme un sentiment de satisfaction et d’accomplissement au travail », explique Jacques Forest, qui fait des recherches sur ce sujet en collaboration avec 300 autres chercheurs.ses dans le monde.
Recommandations :
- Encourager l’intervention rapide et la communication afin que les conflits interpersonnels se règlent rapidement
- Maintenir une synergie par des activités, dîners ou 5 à 7 en équipe
- S’assurer que les procédures soient claires justes et impartiales afin d’éviter la jalousie entre collègues
Deux facteurs prépondérants pour susciter la motivation
Enfin, l’actuel retour au bureau dans certains cas, en raison de 2 ou 3 jours par semaine suscite pour certain.e.s salarié.e.s une perte de motivation. « Il faut expliquer les raisons qui justifient notre présence au bureau. Vient-on parce que l’employeur paie un espace ou encore davantage pour des rencontres d’équipe qui génèrent de meilleures idées?», demande Jacques Forest.
Celui-ci suggère aux employeurs de demander aux salarié.e.s quelles sont leurs préférences. Ces personnes sont les mieux placées à savoir si leurs tâches s’accomplissent plus efficacement du bureau ou de la maison. L’important, c’est que la personne se sente consultée, considérée dans ce processus.
À lire aussi
L’épineuse question du salaire
De l’avis des spécialistes RH interrogé.e.s, la rémunération juste et équitable fait partie de la motivation et de la rétention des troupes.
« C’est toujours une question de justice. Si vous faites 100 000 $ et votre patron, 140 millions, vous allez dire : je ne suis pas assez payé.e, peu importe l’effort que je consens », illustre monsieur Forest qui estime que la transparence salariale a des retombées bénéfiques.
Aux États-Unis, certaines compagnies possèdent un chiffrier Excel sur Internet qui indique les salaires incluant le nom des employé.e.s et la ville où le travail s’effectue. À cela s’ajoute le nombre d’années d’expérience, et leur expertise technique. L’important, selon lui, c’est d’être rémunéré.e de manière juste et équitable tout en permettant de faire face à ses obligations financières.
À la blague, Jacques Forest compare le salaire à la climatisation. « Si on rentre dans une pièce et que l’air est de qualité et qu’il ne fait pas trop chaud ni trop froid, bref, on est confortable, on arrête d’y penser. »
Perspective de carrière
Toutefois, selon l’étude de Mercer, publié en mai dernier, seulement 56 % des superviseur.e.s rémunéré.e.s sur une base horaire ont indiqué avoir l’intention de rester avec leur entreprise actuelle. « Ces personnes possèdent souvent de vastes connaissances sur l’organisation, gèrent les membres subalternes de l’équipe et exécutent des projets clés au quotidien. Il est essentiel de leur offrir des possibilités d’avancement. En fin de compte, si vous n’offrez pas de perspectives de carrière, elles les trouveront ailleurs », précise les chercheurs.
L’humain à l’avant plan
« Ce qui motive le plus un être humain, c’est le sentiment de se sentir important. Aujourd’hui, le mot qu’on entend beaucoup chez les milléniaux, c’est le sens : la reconnaissance est directement liée à la motivation », explique d’un ton convaincu Marc-André Morel, conférencier et auteur. Selon lui, « ce que l’être humain recherche le plus c’est d’être apprécié et reconnu. La reconnaissance, cela ne coûte rien. Les patrons disent : ça nous prend un nouvel air climatisé, de plus grands bureaux, une machine à Espresso, mais l’être humain ne fonctionne pas au café Espresso, mais à son sentiment de bien-être.»
Dans ses conférences, M. Morel explique que la reconnaissance doit faire partie de la culture organisationnelle. Durant ses conférences sur l'esprit d'équipe, il encourage l'appréciation entre collègues. « Attention, dit-il, cela n’est pas de dire : t’es donc fine, tu as donc une belle robe. Cela relève de la flatterie.»
Même avis du côté de Mylène Grégoire, présidente et coach chez Mymosa &CO qui croit qu’offrir de la reconnaissance est essentiel pour faire émerger davantage les compétences.
Selon elle, une rétroaction sera plus percutante si elle souligne la contribution précisément.
Par exemple, dire bravo ou beau travail à un.e employé.e n’a pas la même envergure que : j’ai remarqué que tu as un excellent sens des affaires. « Le fait d’avoir pris l’initiative d’améliorer ce processus de gestion des rapports nous permet à tous d’être plus efficace et de capitaliser sur les activités à haute valeur.»
La reconnaissance professionnelle en 4 points* :
- Sincérité. Une vraie marque de reconnaissance est sincère, simple sans superlatif.
- Spécifique. Le collègue explique ce qui justifie le geste d’appréciation.
- Immédiateté. La reconnaissance, c’est de dire merci aussi tôt que possible dans les heures ou les jours qui suivent.
- Bénéfices. Il s’agit des bénéfices que la personne a retiré de l’aide reçue par exemple d’un collègue.
De son côté, la coach en leadership bienveillant, Julie Tremblay-Potvin soutient que le salaire est certes une source de motivation. « J’observe aussi plusieurs personnes qui tentent de se composer une qualité de vie et un horaire permettant une meilleure équation travail-famille : faire du sport, aller en nature et profiter de plus longues fins de semaine. C’est ça que les gens recherchent », dit-elle d’un ton convaincu.
Pour d’autres, la motivation au travail rime avec flexibilité, horaire souple et la fierté de livrer un service, produit de qualité. « L’important, c’est la nature humaine dans notre organisation. Il faut voir au-delà de la transaction : je te donne une paie en échange d’heures que tu me donnes. Je pense que pour motiver et retenir les employé.e.s, il faut être d’abord en relation avec eux », conclut-elle.
*Source: Marc-André Morel.