Mieux-être au travail : 3 ingrédients essentiels
Un récent sondage mené par L'Événement Carrières démontre que 63 % des personnes interrogées estiment qu’un environnement professionnel agréable et stimulant est prioritaire sur le salaire. Et ce n’est pas si étonnant de vouloir se sentir bien au travail, lorsqu’on y passe la majorité de la semaine. Voici la philosophie de deux dirigeant.e.s d’entreprise qui conjuguent au quotidien le travail avec le bien-être des troupes.
Ancienne directrice RH du Groupe Germain, une firme hôtelière importante au Québec, Sophie Brochu est devenue conférencière et coach auprès des employeurs. En 2017, elle lance son entreprise, Expérience Happy Moments dont le produit phare, le jeu « Bonheur au travail » privilégie des moments rassembleurs au sein des équipes.
Lors de ses rencontres, Sophie Brochu explique aux dirigeant.e.s de différentes organisations l’utilité de se préoccuper du bonheur de ses salarié.e.s.
« Si une personne se sent heureuse et épanouie dans son emploi, elle va davantage performer qu’une autre qui se sentira démoralisée pour diverses raisons, et ne s’estimera peut-être pas à sa place. »
- Sophie Brochu
La pandémie comme catalyseur du bien-être en entreprise
Depuis 4 ans, en raison de la pandémie mondiale, de plus en plus d’employeurs au Québec prennent conscience de l’importance de prendre soin de leurs équipes.
Aux États-Unis, toutefois, ce réflexe était déjà bien ancré. Par exemple, pensons à la multinationale Google qui a conçu le poste de Chief Happiness Officer (CHO) il y a plus d’une décennie, axé sur l’instauration de conditions propices au bien-être des équipes.
Au Québec, cette personne est la responsable de l’expérience employé.e. Qu’importe l’appellation, ce rôle a pour mission de favoriser une culture d’entreprise positive et un climat sain, d’encadrer la nouvelle recrue ou encore d’organiser des activités renforçant l’esprit d’équipe.
Une lourde responsabilité devenue l’affaire de toute l’équipe
Néanmoins, la présidente fondatrice d’Expérience Happy moments tient à apporter une nuance fondamentale. « Ce n’est pas le travail des gestionnaires de prendre sur leurs épaules le bonheur des employé.e.s, dit-elle. Il est évident que tout le monde reste responsable de son propre bonheur. »
Le président et co-fondateur de KandJu François St-Laurent a longtemps ressenti cette pression, voire ce fardeau, d’être responsable du « bonheur » de ses collaborateurs.trices. ll compare cela à un feu de camp qui rassemble les individus. « Pour moi, ce feu symbolise la mission, la vision et les valeurs de notre organisation, explique-t-il. Plusieurs vont y trouver le réconfort, la chaleur, la lumière. »
Aujourd’hui, la PME de Saint-Césaire qui fabrique des bonbons est en pleine croissance avec 9 points de vente au Québec et fournit de l’emploi à une centaine de personnes. « Avec le temps, j’ai compris que je devais lâcher prise. Parfois, il y a des nuages gris qui passent et c’est bien correct. On sait tous que le soleil va revenir », illustre François St-Laurent.
Car préciser ce qui ne va pas permet souvent de trouver des solutions ou des compromis en collégialité. Il peut être pertinent aussi de partager ses bons coups pour stimuler la positivité.
De plus, la satisfaction au quotidien relève, selon lui, d’une affaire d’équipe. Récemment, une employée de KandJu a confié que sa fille venait d’accoucher. Son gestionnaire lui a alors suggéré de prendre congé le reste de la semaine afin de passer ce temps précieux avec sa fille et petite-fille. À son retour, la joie de la nouvelle grand-maman était contagieuse.
Cultiver le bien-être au travail
Ingrédient numéro 1 : entretenir de bonnes relations
L’élément essentiel au boulot n’est pas nécessairement lié au salaire ou aux avantages sociaux.
Songeant à son propre parcours, la présidente de Expérience Happy Moments estime que la création de liens tangibles au sein d’une équipe est aussi un gage de fidélisation.
« Quand je regarde en arrière, je réalise que c’est la qualité des relations avec mes collègues, mon patron ou ma patronne qui a contribué à mon bonheur au travail. »
L’automne dernier, une étude de l’Université Harvard a révélé que de bonnes relations amicales ou familiales ont un impact palpable au quotidien. « Lorsque des conflits relationnels surgissent dans notre vie, on voit bien à quel point, cela peut affecter notre bien-être », observe Sophie Brochu.
Ingrédient numéro 2 : vivre et partager ses valeurs
Chez KandJu, les valeurs de l’entreprise ne sont peut-être pas affichées, mais elles sont au cœur des discussions avec les employé.e.s, fournisseurs et client.e.s.
« Nous nous comparons souvent à une équipe de hockey avec un.e gardien.ne, des attaquant.e.s, des défenseur.e.s où chacun.e a un rôle précis à jouer. »
- François St-Laurent
Lors d’une rencontre avec un.e candidat.e, François St-Laurent ou un.e membre du comité de sélection, prend le temps de détailler les valeurs qui se regroupent sous l’acronyme TEAM ou équipe, en français.
Signification de « TEAM » pour KandJu
T pour Transparence
Les membres de la direction et du personnel aspirent à être transparent.e.s, c’est-à-dire à mettre parfois l’égo de côté et à se montrer humbles et vulnérables. Il peut s’agir d’admettre une erreur ou encore de révéler sa véritable humeur à ses collègues.
E pour Entraide
Au travail, le personnel de l’entreprise de Saint-Césaire fait preuve d’entraide, mais aussi d’acceptation. Au sein d’une équipe, la vie des gens est façonnée par l’éducation, la culture ou le pays d’origine. « Il faut être capable de comprendre les gens qui travaillent avec nous, de s’accepter les un.e.s, les autres ainsi que nos différences », indique François St-Laurent.
A pour Amour
À l’origine de la création de KandJu, en 2006, se trouvent François St-Laurent, un électricien de métier, et sa conjointe Marie-Ève, une designer d’intérieur de formation, qui désiraient passer plus de temps ensemble. Leur bonheur se transmet aux autres par l’entremise de la gentillesse, du partage, de la générosité et de l’écoute. « Je répète souvent à mes employé.e.s combien je les apprécie », confie-t-il en se disant chanceux de compter sur le talent de chacun.e.
M pour Motivation
La motivation est intimement liée à la capacité d’apprendre, estime le dirigeant. « Il est important de continuer de se former professionnellement, mais aussi au sujet de choses qui nous passionnent et nous inspirent », explique le chef d’entreprise qui poursuit son apprentissage à l’École d’Entrepreneurship de Beauce.
Une autre valeur du fabricant de bonbons qui favorise la motivation des troupes est la conciliation famille-travail. Par exemple, la direction permet aux parents d’assister au spectacle de leur enfant, même durant les heures de travail. Cet équilibre de vie instaure un climat de confiance envers le.la salarié.e qui doit toutefois reprendre ses heures, plus tard, au moment approprié.
Ingrédient numéro 3 : la gratifiante reconnaissance
Le bonheur au travail, selon Sophie Brochu, est aussi lié à la notion de l’auto-reconnaissance. « Si je suis constamment en train de chercher la validation auprès de mes supérieur.es, de mes collègues alors que je fais du bon travail, c’est peut-être qu’au fond de moi, je n’y crois pas. »
Les êtres humains, c'est connu, ont tendance à se critiquer. Dans un tel cas, Sophie Brochu recommande de s’offrir une pause, un recul. « Puis, réalisez ce que vous avez accompli. Qu’est-ce qui vous rend fier.ère et heureux.se ? Avez-vous l’impression d’avoir progressé et évolué ? »
Au-delà d’avoir confiance en ses habiletés, les employé.e.s. doivent ressentir qu’ils et elles contribuent à la croissance de l’organisation. « Si j’ai le sentiment qu’on ne se soucie pas de ma prestation, c’est sûr que j’aurai plus de la difficulté à être motivé.e et content.e. », souligne-t-elle.
Des pistes pour pratiquer le mieux-être au travail
Gestion de proximité
Même si les PME n’ont pas de responsable de l’expérience employé.e, il est possible de créer une gestion de proximité avec les salarié.e.s en adoptant une approche participative et humaine.
« Il faut se préoccuper des gens en se connectant avec eux, suggère Sophie Brochu. Il faut oser leur demander ce qu’on peut faire pour améliorer la qualité de vie des membres du personnel et les engager dans le processus. »
Son jeu « Bonheur au travail » permet d’ailleurs de poser des questions ludiques au personnel avec un brin d’humour.
« Le but est de mettre du plaisir dans nos réunions, précise-t-elle, et surtout d’impliquer les membres de l’équipe dans l’objectif d’élever le niveau de bonheur dans notre milieu de travail. On voit souvent de bonnes idées émerger dans un tel contexte. »
« La vie est tellement plus belle quand on travaille dans le bonheur en étant à l’écoute des employé.e.s », ajoute de son côté François St-Laurent.
L’importance de souligner les succès de l’équipe
Célébrer l’atteinte ou le dépassement des objectifs de l’entreprise est fondamental pour l’esprit d’équipe. Il est généralement facile de préparer un 5 à 7 à l’intérieur des bureaux par exemple.
Pour ce faire, François St-Laurent mise sur la qualité du temps passé avec ses équipes en organisant des activités ludiques. « Les gens vont se souvenir des moments magiques qui suscitent des émotions comme une fin de semaine à Mont-Tremblant », relève-t-il.
« Et lorsque l’objectif n’est pas atteint, on prend le temps de se demander quels sont nos apprentissages et comment faire différemment la prochaine fois pour y arriver », suggère Sophie Brochu.
Tendance à la hausse : des jeux de société pour souder les équipes
Dans une grande salle d’une PME de Laval, une centaine de personnes jouent ensemble à un jeu de société. Des blagues fusent. Deux animateurs se promènent en donnant leurs instructions.
Cette scène se multiplie dans différents endroits au Québec afin de célébrer par exemple le succès d’un nouveau produit, le 50e anniversaire d’un.e. employé.e. ou encore le départ à la retraite d’un.e autre.
Tous les prétextes sont bons pour divertir son personnel, et cette tendance est en progression, affirme Tommy Groleau, gérant du Pub ludique Randolph à Laval, l’une des 9 franchises existant au Québec spécialisées dans les partys de jeux de société.
En effet, de plus en plus d’employeurs privilégient ce type d’animation de team building qui donne l’occasion au personnel d’interagir dans un but commun.
Pendant quelques heures, des salarié.e.s de différents départements et de différentes générations qui ne se connaissent pas forcément, vont se côtoyer en gardant en tête l’objectif de gagner la partie.
« Passer de bons moments ensemble avec les membres de son équipe ne peut être que bénéfique, croit Tommy Groleau. Les jeux de société rapprochent les gens qui ne partagent pas nécessairement les mêmes centres d’intérêt. »
En conclusion, chaque employeur peut propager de la satisfaction à ses troupes, par ses propres initiatives et après avoir pris soin d’observer les besoins. Toutefois, l’écoute, la reconnaissance, le partage de valeurs et la confiance sont des ingrédients essentiels à la création d’un climat harmonieux, gage de rétention et de fidélisation.