Stress financier : des employeurs à la rescousse

14-06-2024
Le stress financier vécu par 1 Québécois.e sur 2 ronge insidieusement le monde du travail. Voici comment des employeurs aident à calmer le jeu.
Rédigé par :
Annie Bourque, Pratiques RH
Femme qui stresse devant son poste de travail

Plusieurs employé.e.s canadien.ne.s, peu importe leur génération, nationalité ou secteur d’activité, s’inquiètent de leurs finances et de la multiplication de leurs dettes. Au travail, ces préoccupations affectent le moral, la motivation des troupes et nuisent à la productivité. 

Selon un sondage réalisé à l’hiver 2024, en pleine inflation, par la firme Léger, 46 % des répondant.e.s éprouvent de l’anxiété financière en raison de l’augmentation des différents postes de dépenses (épicerie, logement, transport, etc.).

Indéniablement, les soucis d’ordre pécuniaire provoquent aussi un manque de concentration et même des erreurs d’inattention ou administratives qui affectent la qualité de la production.

Des chiffres frappants

  • 1000 $ c’est le montant qui représente la perte de productivité, par employé.e, dans une entreprise de 200 personnes au cours d’une année. Source
  • 46% des salarié.e.s consacrent 3 heures ou plus par jour à des questions financières. Source
  • 44% des Canadien.ne.s s’inquiètent de leur taux d’endettement élevé. Source
  • 62% des Canadien.ne.s craignent de manquer d’argent à la retraite. Source
  • 80% des Québécois.e.s ont des problèmes de sommeil en raison de leurs problèmes financiers. Source
  • 24% des locataires québécois.e.s craignent d’être évincé.e.s de leur logement. Cette proportion s’élève à 39 % chez les personnes racisées. Source

La solution : accroître les connaissances en littératie financière

Face à la montée inflationniste qui affecte le portefeuille de tous et de toutes, plusieurs organisations désirent se pencher sur le bien-être financier de leurs équipes.  

Toutefois, comment y parvenir ? La meilleure façon passe par l’amélioration des connaissances au sujet des finances personnelles.

En effet, seulement 47 % des personnes qui ont répondu au récent sondage Léger maitrisent l’essentiel de la littératie financière.

L’entreprise québécoise Solertia, spécialisée en rémunération globale, gestion des ressources humaines et avantages sociaux, bien consciente de cet enjeu, a créé un programme d’éducation financière (PEF).  

« Notre firme, en contact avec de haut.e.s dirigeant.e.s d’entreprises, désire aider leurs employé.e.s à mieux comprendre leurs finances et à prendre les bonnes décisions », explique Stefan Kolovic, directeur des relations clients, éducation financière chez Solertia.  

Bien souvent, l’employé.e s’interroge sur quelques éléments phares qui touchent de près à ses finances :

- Dois-je choisir entre un REER ou un CELI ?

- Louer ou acheter un véhicule ?

- Quelle stratégie adopter lors de mon prochain renouvellement d’hypothèque ?

Des conseils personnalisés et pertinents 

En matière de finances, les salarié.e.s vont parfois s’informer auprès de leur famille ou de leur succursale bancaire. Or, un récent reportage de CBC démontre que certaines institutions financières favorisent la vente de produits au détriment des besoins de leurs client.e.s.  

De leur côté, les expert.e.s de Solertia, engagé.e.s par les employeurs, ne vendent aucun produit.  « Au contraire, nous fournissons des conseils totalement indépendants pour améliorer les connaissances des employé.e.s afin qu’ils et elles puissent prendre les bonnes décisions et adopter les bons comportements à long terme », précise Stefan Kolovic. 

Leur programme encourage l’adoption de saines habitudes financières selon les enjeux des différentes réalités d’employé.e.s : de la personne à l’aube de sa retraite, en passant par l’amateur de motocyclettes, la future maman célibataire dans la trentaine à la nouvelle immigrante en quête d’une propriété.  

À l’heure actuelle, plusieurs jeunes s’inquiètent de l’impossibilité de devenir propriétaire en raison du taux d’intérêt élevé. « Nous les aidons à adopter des stratégies afin de cumuler une mise de fonds plus rapidement et ainsi réaliser leur rêve », indique monsieur Kolovic.   

Enseigner les bases à tout le monde 

La portion dédiée aux nouveaux et nouvelles arrivant.e.s du programme d’éducation financière conçu par Solertia enseigne des notions essentielles concernant :  

  1. Le fonctionnement du système financier canadien 
  2. L’épargne-retraite 

Stefan Kolovic a en tête l’exemple d’une employée de nationalité française venue s’installer au Québec. « En France, explique-t-il, les besoins d’épargne-retraite sont fortement comblés par les programmes gouvernementaux. Ici, il faut comprendre que le gouvernement couvre une portion modeste du revenu à la retraite (soit à peine 25 à 30 % du salaire à la retraite) qui est loin d’être suffisante dans la très grande majorité des cas. » 

De plus, pour s’émanciper économiquement, les personnes immigrantes doivent comprendre les mécanismes de l’accès et de la gestion du crédit qui sont généralement bien différents dans leur pays. 

Depuis un an, les expert.e.s de Solertia aident également les étudiant.e.s internationaux qui étudient dans une université canadienne à s’intégrer en se familiarisant avec le monde des finances. 

Démystifier le charabia financier

Autant les Québécois.e.s que les personnes issues de l’immigration peinent parfois à comprendre les différentes modalités des REER, REEE, CELI, RRQ (Régime des rentes du Québec) et autres projets d’épargne.  

La réduction du stress lié à la gestion des finances personnelles est étroitement liée à l’apprentissage et à la compréhension de ce langage, voire ce charabia financier.  

Cas vécus au Québec

Stefan Kolovic et ses collègues se rendent aussi en entreprise afin de répondre directement aux interrogations des membres du personnel.  

La retraite, c’est pour quand? 

Lors d’une visite dans une usine, à son grand étonnement, le spécialiste entend les commentaires d’employé.e.s visiblement découragé.e.s qui pensaient devoir repousser leur retraite aux calendes grecques.  

« Les gens faisaient en fait référence à une mesure annoncée en 2013 par l’ancien gouvernement conservateur concernant le report de l’âge d’admissibilité à la Pension de la Sécurité de la vieillesse qui n’est même plus en vigueur aujourd’hui. » 

Imaginez le soulagement de ces salarié.e.s qui obtiennent l’heure juste concernant la possibilité de profiter d’une retraite bien méritée à un moment qui leur conviendra ! 

Travailler jusqu’à 87 ans à cause des dettes 

Un employé, dans une autre manufacture, a confié sa crainte de devoir travailler jusqu’à 87 ans compte tenu de l’étendue de ses dettes.  

Des ressources pour l’appuyer dans la gestion de ses finances personnelles (comptable, avocat.e. courtier.ère hypothécaire) lui ont donc été suggérées. Finalement, au bout d’un an et demi, l’homme a pu voir la lumière au bout du tunnel grâce à une réorganisation complète de ses finances qui tenait compte des pensions gouvernementales à sa retraite.  

Vendre ou pas sa maison ?  

Un couple de salarié.e.s, endetté jusqu’au cou, pensait vendre leur maison. « Il a fallu faire cet exercice fort ennuyant pour bien des gens, soit celui d’apprendre à établir un budget qui tient compte des dépenses et des revenus », mentionne en souriant Stefan Kolovic.  

Le budget permet de savoir où va exactement le salaire. Combien alloue-t-on au logement, aux frais d’épicerie, de loisirs, d’essence, d’hypothèque ?

Le couple en question est parvenu à sabrer certains achats superflus et est toujours propriétaire de leur demeure. 

Baromètre de santé financière

Au cours de la dernière année, Solertia a mis en place un nouvel outil, le baromètre de santé financière dédié aux promoteur.ice.s et participant.e.s de son programme.  

Ces dernier.ère.s répondent à un rapide questionnaire qui permet d’établir un diagnostic complet de leur santé financière. Cet exercice contribue à évaluer le niveau de stress financier ressenti, la compréhension de la littératie financière, le degré de préparation des gens à la retraite ou encore leurs sources d’informations. Se fie-t-on à un conseiller.ère, au beau-frère ou à un site Internet ? 

Une fois toutes les données cumulées de manière confidentielle, Solertia effectue l’analyse nécessaire pour pouvoir dégager une image globale de la santé financière des employé.e.s et gestionnaires de l’organisation. Un accompagnement et des pistes de solution sont ensuite mis en place afin de combler les besoins réels des gens.  

L’organisation s’assure ainsi de maximiser le retour sur son investissement. De son côté, le personnel obtient le soutien nécessaire.  

L’anxiété liée aux finances : un phénomène qui touche toute la main-d’œuvre 

Les spécialistes de Solertia se déplacent dans les manufactures, mais aussi dans des firmes d’avocats, d’ingénierie, ou encore auprès de professionnel.le.s en TI (Technologies de l’information).   

« Il faut vraiment défaire le mythe que les emplois “à statut social élevé” n’ont pas besoin de conseils. Peu importe le salaire, les gens ont besoin d’accompagnement et de soutien financier indépendant et de qualité. »

- Stefan Kolovic

Les employeurs et les salarié.e.s décident de la formule qui leur convient : conférences ou rencontres personnalisées sur les lieux de travail, en virtuel, échange de courriels, etc. Le but est d’expliquer aux équipes, peu importe leur niveau d’aisance avec les finances personnelles, les meilleures stratégies à mettre en place pour chacun.e.  

« Notre plus grande satisfaction, c’est de constater que les gens ont compris le concept de la littératie financière et peuvent enfin réaliser leurs projets. »  

Les 5 bénéfices du mieux-être financier

Les entreprises qui favorisent des initiatives afin d’améliorer le bien-être financier de leurs travailleurs et travailleuses en retirent des bienfaits concrets.

  1. Les employé.e.s ressentent un meilleur contrôle de leur argent.
  2. Leur santé financière se porte mieux, ainsi que leur santé mentale et physique.
  3. Augmentation de l’engagement au travail.
  4. Accroissement de la productivité.
  5. Hausse des profits de l’entreprise.

Source : Rapport Manuvie 2022 : Stress, finances et bien-être

Une formule gagnante

Depuis la pandémie, de nombreux employeurs cherchent à se démarquer afin de retenir leurs salarié.e.s. L’usine Synertek de Québec offre par exemple des conférences avec des spécialistes financiers, et cela a un impact concret sur la rétention de son personnel.   

Plus que jamais, ces initiatives deviennent une stratégie gagnante pour les employeurs qui aspirent à aider leurs employé.e.s, démuni.e.s face à une montée inflationniste qui les touche personnellement.  

La quiétude et la paix d’esprit de chacun.e les aident indéniablement à relever de beaux défis dans leurs fonctions. Et cela n’a pas de prix !