Références professionnelles : comment bien structurer les embauches par recommandation

04-08-2025
Thématiques : Recrutement  -  Article informationnel
Lorsqu’une personne de l’équipe propose de recommander un.e ancien.ne collègue, un.e ami.e ou même son.sa coach de yoga, cela peut ressembler à une solution idéale...
Rédigé par :
Victoire Bejjani, Pratiques RH
Références professionnelles

Recruter un bon profil, c’est un peu comme réussir à trouver une place de stationnement au centre-ville à l’heure de pointe : ça demande du flair, de la patience et parfois un peu de chance ! Alors quand une référence tombe du ciel, difficile de ne pas sauter dessus. 

Mais une référence ne se résume pas à un simple « je connais quelqu’un », c’est un processus à part entière, avec ses avantages et ses risques. Un programme de référencement bien structuré peut devenir un atout stratégique, à condition d’être transparent, équitable et rigoureux. 

Accepter une candidature référée, c’est aussi accepter de poser les bonnes questions : la personne référée correspond-elle réellement aux besoins du poste ? Est-ce que l’évaluation reste objective, malgré le lien personnel ? Le processus est-il clair pour tout le monde ? 

Voici comment poser des balises claires, adopter une communication honnête et faire preuve de discernement lorsqu’une organisation embauche grâce au référencement. 

Pourquoi s’intéresser aux références internes ?                                     

Le recrutement coûte cher. Selon un rapport de la Society for Human Resource Management, le coût moyen par embauche au Canada dépasse les 4 000 $. Et ce n’est que la pointe de l’iceberg.  

Le roulement de personnel entraîne des conséquences financières majeures : près d’un.e gestionnaire d’embauche sur cinq (17 %) estime qu’il en coûte plus de 100 000 $ par année à son organisation, d’après un sondage mené par Harris Poll pour le compte d’Express Services. 

Le hic ? Même avec ces investissements, rien ne garantit que la personne embauchée reste. Une référence bien ciblée peut non seulement réduire les coûts, mais aussi accélérer l’intégration et améliorer la rétention. 

Au Québec, où près de 60 % des entreprises rencontrent des difficultés de recrutement, les programmes de référencement deviennent des leviers précieux. Encore faut-il les encadrer avec soin. 

1. Mettre en place un vrai programme (pas juste une rumeur de corridor)

Un bon programme de référencement repose sur des bases simples, mais solides : des critères clairs, un canal de dépôt bien identifié, une récompense motivante. 

Jean-Philippe Racine, PDG de Cyberswat, explique la tendance croissante : « à un moment, on était en pleine pénurie de main-d’œuvre. Le référencement s’est imposé comme une idée simple, mais porteuse. On a mis en place une page dédiée sur notre site web, avec des montants qui varient selon les postes. » 

La logique est différenciée, presque comme dans le recrutement par chasse de têtes. Et pour éviter les excès de zèle, la prime est versée en deux temps : la première moitié après 3 mois, le reste après 6. Une manière subtile, mais efficace d’engager les référent.e.s sans précipiter les candidatures. 

Les termes à utiliser (et à éviter) 

Selon l’Office québécois de la langue française

Termes recommandés :

  • Prime de recommandation
  • Prime de parrainage
  • Prime de cooptation

Termes déconseillés :

  • Prime de référence
  • Boni de référence
  • Prime de référencement

Pourquoi ? 
Parce que « référence » désigne, en français, les personnes appelées à témoigner des compétences d’un.e candidat.e, pas une recommandation directe. 
Et « référencement » renvoie plutôt… aux moteurs de recherche ! 

*Dans le langage courant, l’expression « programme de référencement » est fréquemment utilisée. Il reste toutefois essentiel de bien définir ce terme et de privilégier des formulations précises lorsqu’il est question de primes ou de politiques officielles. 

2. Apprendre à référer intelligemment 

« Tu devrais engager ma sœur, elle est super gentille » : voilà exactement ce qu’un programme bien pensé doit éviter. Référer ne veut pas dire recommander à l’aveugle. Cela suppose une réflexion de base sur la pertinence du profil. 

Chez GKC, la règle est claire : « le rôle de la personne qui réfère s’arrête au moment de la remise du CV. On ne lui demande pas de garantir quoi que ce soit », rappelle Anouchka Hurst, directrice des opérations. 

Certaines entreprises organisent de courtes séances pour sensibiliser les équipes. D’autres misent sur des guides internes, accessibles et déculpabilisants. L’objectif reste le même : s’assurer que chacun sait ce qu’implique vraiment une recommandation. 

3. Gérer les attentes pour éviter les crispations 

Accepter une référence, ce n’est pas promettre une embauche. C’est simplement ouvrir la porte à une candidature.   

Comme les autres, la personne recommandée devra franchir chaque étape du processus de sélection, incluant, au besoin, des tests de connaissances ou psychométriques. En d’autres mots : une recommandation donne un accès, pas un raccourci. 

« Il nous est arrivé de ne pas verser la deuxième moitié de la prime, quand la personne embauchée quittait avant les six mois, confie Jean-Philippe Racine.  Mais on l’explique à l’avance. Il n’y a jamais eu de conflit. » 

Même constat du côté d’Anouchka Hurst : « on précise que le processus de sélection reste exactement le même. La personne référée est traitée comme n’importe quelle autre candidature. » 

4. Éviter la reproduction sociale (et élargir les cercles) 

Le recrutement par affinité peut vite créer une équipe homogène. Pourtant, la diversité est un moteur d’innovation.  

« On n’a pas ciblé la diversité, mais on a observé une vague de candidatures enrichissantes, venues de réseaux qu’on n’aurait jamais rejoints autrement. »

-Jean Philippe Racine

Chez Cyberswat, ce sont des travailleur.eu.s.e étranger.ère.s qui ont naturellement référé des profils de leur entourage. « C’est venu tout seul », constate Jean-Philippe Racine.  

Sans même le nommer, l’effet a été là. La diversité est parfois plus une conséquence d’un climat ouvert qu’un objectif formel. 

5. Soigner l’intégration (même quand la personne est « déjà connue ») 

Une personne recommandée n’a pas besoin de moins d’onboarding. Au contraire ! Il faut éviter le piège du « ça va aller, elle connaît déjà quelques employé.e.s ». 

« Le lien personnel ne remplace pas un vrai accueil structuré qui doit être assuré par l’employeur. »

-Anouchka Hurst

Certaines organisations mettent en place un parcours d’intégration en plusieurs étapes, avec des points à 30, 60, 90 jours, et un.e « complice » désigné.e, parfois la personne référente, parfois non. 
« On a un système d’intégration pour toutes les nouvelles recrues, souligne Mme Hurst. Ça peut être le.la référent.e, mais ce n’est pas automatique. » 

6. Valoriser les bonnes recommandations 

Derrière chaque recrutement réussi, il y a souvent un.e collègue qui a pris le temps d’en parler. Reconnaître cette action est tout aussi important que de verser une prime. 

Certaines entreprises misent sur un système cumulatif : une prime est versée à chaque embauche réussie, ce qui permet aux employé·e·s qui enchaînent les bonnes recommandations de cumuler les récompenses. Une façon de reconnaître les talents… Qui repèrent les talents ! 

D’autres ajoutent une touche symbolique : badge d’ambassadeur.ice, tableau d’honneur, ou simple mention lors d’un événement interne. « Le programme de référencement n’est pas nécessairement le canal le plus productif en volume, admet Jean-Philippe Racine, mais ça renforce l’engagement des équipes. Et parfois, ça donne des pépites. » 

Prime de cooptation au Québec : combien ça coûte vraiment ? 

  1. C’est assujetti aux cotisations sociales 
    La prime s’ajoute au salaire brut du.de la salarié.e et entraîne des retenues/surcharges, au fédéral et au provincial. Il n’y a pas d’exonération spécifique. 

  2. Exemples de cotisations patronales (2025) 
    Sur la prime versée, l’employeur paie environ 17 % à 18 % de charges, soit : 

    • RRQ (retraite) : 6,40 %
    • RQAP (congé parental) : 0,692 %
    • AE (assurance-emploi) : 1,83 %
    • CNESST + normes travail + FSS : environ 4,0 % (selon le secteur)   
  3. Exemple ultra simplifié : 

    • Prime = 1 000 $. 

    • Employeur paye : 1 000 $ × 17 % = 170 $ de charges en sus. 

  4. Part de l’employé.e = retenues similaires 
    L’employé.e contribue aussi : retenues pour RRQ (~5,4 %), RQAP, AE, impôt sur le revenu, etc. 

  5. Astuce fiscales : chèques-cadeaux bien ciblés 
    Au Québec, attention, il n’y a pas de régime particulier comme en France. Les récompenses en argent sont imposables/cotisables. Les avantages en nature (cartes-cadeaux, cadeaux) sont analysés selon le contexte, donc place à la vigilance. 

Confiance, clarté et culture : la recommandation a du bon ! 

Un programme de référencement efficace, c’est : 

  • Un processus clair et équitable
  • Des employés.e.s bien informé.e.s
  • Une reconnaissance à la hauteur de l’implication 

Mais surtout, c’est une manière concrète de faire vivre la culture d’entreprise. 

Comme le dit Anouchka Hurst : « référer, c’est avant tout un acte de confiance. Il faut que les équipes se sentent libres de le faire… Et aussi libres de ne pas le faire. »