La qualité de l’air : pourquoi s’en soucier en entreprise ?

15-07-2025
Thématiques : Gestion de la SST  -  Article informationnel
L'air que les employé.e.s respirent au travail peut nuire à leur santé, mais aussi à la productivité : voici pourquoi la qualité de l'air est un impératif.
Éric Binette

Auteur.e

Éric Binette, conseiller, santé et sécurité au travail

La qualité de l’air : pourquoi s’en soucier en entreprise ?

Selon l’Organisation météorologique mondiale (OMM), la qualité de l’air et le climat sont intimement reliés au changement climatique. Dans les prochaines décennies, les populations seront confrontées à de plus en plus d’événements météorologiques extrêmes, y compris les vagues de chaleur et les feux de forêt. 

En bref, le constat est clair : la qualité de l’air diminue au fur et à mesure que le changement climatique augmente, selon les Nations Unies (2022).

La qualité de l’air : un élément incontournable pour un lieu de travail sain. 

Dans les milieux de travail aussi, la qualité de l’air n’est pas négligeable. 

En effet, l’exposition soutenue à des contaminants peut entrainer de sérieux problèmes de santé et de sécurité pour les travailleur.euse.s, menant parfois à une perte de productivité notable ainsi qu’à un taux d’absentéisme élevé. 

Pour les employeurs, les conséquences sont donc considérables. 

Malgré l’absence d’une loi spécifique en la matière, selon l’article 51 de la LSST, les employeurs se doivent de fournir « un lieu de travail sain » pour leurs employé.e.s. La disposition d'obligation générale stipule que l'employeur doit fournir un lieu de travail sain et sécuritaire. Cela implique, entre autres, de s'assurer que la qualité de l'air est acceptable pour le personnel.

Une bonne et une mauvaise qualité de l’air

Tout d’abord, la qualité de l’air (QAI) est déterminée selon l’interrelation entre divers éléments de l’environnement de travail, c’est-à-dire, le climat, les occupant.e.s, les matériaux de construction, le mobilier ainsi que les activités qui se déroulent dans le bâtiment. 

L’air doit contribuer positivement et activement à la santé et au bien-être des travailleur.euse.s.

Plus précisément, selon la norme ASHRAE, le bâtiment doit respecter les niveaux acceptables des contaminants suivants : produits chimiques, gaz, vapeurs, poussières, moisissures, champignons, bactéries, odeurs et autres produits connexes. 

De plus, l’immeuble doit offrir un environnement de travail adéquat, soit en lien avec : la température ambiante, le pourcentage d’humidité, la circulation de l’air ainsi que l’apport suffisant en air extérieur.

→ Une mauvaise qualité de l’air ne respecte donc pas les niveaux acceptables de certains contaminants et n’offre pas un environnement adéquat.

Comment améliorer la qualité de l’air ?

Voici les étapes à suivre afin de corriger une qualité de l’air non conforme : 

  1. Reconnaitre les problèmes d’air : souvent reliés au système de ventilation et au système de chauffage qui sont mal entretenus ou tout simplement inadéquats, à la contamination des matériaux de construction (peintures, fibres, colles, etc.) ou encore à l’augmentation du nombre de personnes travaillant dans le bâtiment et/ou du nombre d’heures passées dans l’immeuble;
  2. Corriger rapidement les éléments qui contribuent à la problématique.

Les contaminants de l’air et leurs sources

Le tableau suivant présente plus en détail les contaminants et leurs sources principales :

Contaminant(s)

Source(s)

Dioxyde de carbone

Occupant.e.s du bâtiment 
Combustion de combustibles

Monoxyde de carbone

Gaz d’échappement des véhicules 
Prises d’air

Poussières, fibres de verre, amiante & gaz

Matériaux de construction

Vapeurs & composés organiques volatils (COV)

Photocopieuses & imprimantes 
Ordinateurs 
Tapis 
Meubles 
Nettoyants & désinfectants 
Solvants 
Pesticides 
Colles 
Calfeutrages 
Peintures

Acariens

Tapis 
Tissus 
Coussins de siège en mousse

Contaminants microbiens, champignons, moisissures, bactéries, matériaux mouillés ou humides, bacs d’eau stagnante & bacs de récupération de la condensation

Zones humides

Ozone

Photocopieuses 
Moteurs électriques 
Purificateurs d’air 
Électrostatiques

Autres

Fumée de tabac 
Parfum 
Odeur corporelle 
Nourriture

Source : CCHST, 2024. Auteur : Éric Binette, 2025.

Signes et symptômes d’une mauvaise qualité de l’air 

Les conséquences d’une piètre qualité de l’air dans les milieux de travail sont importantes  pour la santé du personnel.

Voici les principaux signes et symptômes à surveiller :

  • Sécheresse des yeux, du nez, de la gorge et/ou de la peau ;
  • Irritation des yeux, du nez, de la gorge et/ou de la peau ;
  • Congestion des sinus ;
  • Maux de tête ;
  • Essoufflement ;
  • Fatigue ;
  • Hypersensibilité et allergies ;
  • Étourdissements ;
  • Nausées.

De plus, il existe des troubles de santé connexes à considérer. Certains problèmes de santé liés à l'air surviennent rapidement, d'autres tardivement après l'exposition. 

En revanche, toutes les personnes ne réagiront pas à certains contaminants et celles-ci peuvent également réagir de manière différente (et selon les niveaux de concentration). 

Il est parfois difficile de reconnaitre ces symptômes puisqu’ils s'apparentent à d’autres maladies ou infections, comme la grippe. Or, si les employé.e.s se sentent mieux quelques heures ou quelques jours après avoir quitté le lieu de travail, il s’agit d’un signe annonciateur.

Tous ces signes et symptômes peuvent par la suite entrainer une perte de productivité des employés.e.s concerné.e.s ainsi que de l’absentéisme au travail, menant même parfois à des sources de conflits entre les travailleur.euse.s et les employeurs.

L’hypersensibilité environnementale : un trouble à prendre au sérieux

Par exemple, certain.e.s travailleur.euse.s peuvent ressentir de l’hypersensibilité environnementale (HE), aussi nommée polysensibilité aux produits chimiques, sensibilité chimique multiple ou encore maladie environnementale. 

Selon l’Association pour la santé environnementale du Canada, plus d’un million de personnes souffriraient de ce trouble au pays (2023)

Les principaux symptômes de l’HE touchent : le système nerveux (maux de tête, insomnie, etc.), l’appareil respiratoire supérieur (nez bouché, infections chroniques), l’appareil respiratoire inférieur (toux, essoufflement, asthme, bronchite, pneumonie, etc.), les yeux (rouges, larmoyants), le système gastro-intestinal (nausées, constipation, etc.), le système endocrinien (fatigue, léthargie), le système musculo-squelettique (TMS)(douleurs articulaires et musculaires, spasmes, etc.), le système cardiovasculaire (rythme cardiaque rapide ou irrégulier, etc.) ainsi que le système génito-urinaire (spasmes de la vessie, etc.), selon ASEQ/EHAQ.

En milieu industriel, les contaminants de l’air incluent souvent : 

  • Poussières (silice, métaux, amiante);
  • Gaz et vapeurs toxiques (CO, NO₂, solvants);
  • Substances cancérogènes (formaldéhyde, HAP, isocyanates);
  • Agents biologiques (dans certains secteurs);
  • Fumées de soudage. 

L’amiante et le radon sont tous deux classés comme cancérogènes pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer.

Les étapes à suivre pour le personnel contaminé

Pour les travailleur.euse.s qui soupçonnent une contamination reliée à la qualité de l’air de leur environnement de travail, voici les étapes recommandées à suivre : 

  • Noter les symptômes : moments, types, intensité ;
  • Le mentionner à la personne responsable de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail si cela est possible ;
  • Consulter un médecin ;
  • Consulter les documents d’informations de la CNESST ;
  • Si nécessaire, contacter directement la CNESST.

Les étapes à suivre pour les employeurs

Lorsqu’un employeur est mis au fait d’une possible contamination reliée à la qualité de l’air dans son bâtiment, voici les étapes à suivre : 

  • iExaminer la ou les plainte(s) (est-ce la première à sujet ?) ;
  • Effectuer une inspection visuelle ;
  • Inspecter le système de ventilation ;
  • Rechercher les causes possibles ;
  • Confirmer que les symptômes sont attribuables à la qualité de l’air à l’aide de l’instrument de vérification approprié ;
  • Effectuer une analyse de risque pour déterminer les conditions, les pratiques, les origines et les causes avec l’aide de la ou du spécialiste en santé et en sécurité;
  • Réfléchir à la possibilité de demander l’aide d’un.e professionnel.le.en bâtiment, comme un.e ingénieur.e.

D’autres éléments à considérer dans les milieux de travail

La contamination de l’air est un facteur majeur de l’apparition de troubles de la santé chez le personnel. Il ne faut donc pas minimiser ses impacts. Cependant, il est important de considérer d’autres facteurs pouvant être responsables de certains symptômes, comme :

Pour les employeurs, il est donc primordial, lorsqu’un.e employé.e présente une plainte reliée à sa santé au travail, d’évaluer toutes les causes possibles et de mettre en place les solutions nécessaires le plus rapidement possible.

Lois et lignes directrices sur la qualité de l’air 

Il n’y a pas de loi précise concernant la qualité de l’air dans les milieux de travail non industriels, et ce, pour la majorité des régions administratives du Canada. 

Par conséquent, la disposition de l’obligation générale des employeurs s’applique (l’employeur doit fournir un lieu de travail sûr et sécuritaire : article 51 de la LSST). 

En outre, c’est à l’employeur que revient la responsabilité de s’assurer de la bonne qualité de l’air dans le milieu de travail.

Ressource utile

Qualité de l’air et santé

De plus, la qualité de l’air est mentionnée (ou sous-entendue) dans la plupart des codes du bâtiment comme étant un critère de conception et d’exploitation. Par exemple, la qualité de l’air est mentionnée à maintes reprises dans le Code de construction du Québec.

Note : Les codes du bâtiment et les lois sur la santé et la sécurité au Canada font référence à la norme 62.1 de l’American Society of Heating Refrigerating and Air Conditioning Engineers (ASHRAE).

Un exemple concret : les feux de forêt et les panaches de fumée

La CNESST met en garde les employeurs face aux feux de forêt et aux panaches de fumée dans les milieux de travail québécois. Ceux-ci sont un risque majeur pour la santé et la sécurité des employé.e.s. 

En fait, la fumée d’incendie contient des substances irritantes. Elle est d’autant plus inquiétante pour les personnes déjà atteintes de maladies comme l’asthme. 

À ce sujet, la CNESST rappelle l’importance pour les employeurs de limiter, voire de bannir (lorsque possible) l’exposition de la main-d'œuvre à la fumée d’incendie.

Les mesures à prendre lors d’un feu de forêt

Voici les mesures à prendre pour l’ensemble du personnel lors d’un feu de forêt :

  • Être attentif.ve aux avis publics et régionaux ;
  • Fermer les fenêtres et les portes ;
  • Rester à l’intérieur des bâtiments ;
  • Ne pas travailler à l’extérieur (si c’est primordial, prioriser les tâches dans une cabine filtrée fermée) ;
  • Porter un appareil de protection respiratoire (N95).

Les mesures à prendre après le feu de forêt (disparition du panache de fumée) :

  • iInspecter le système de ventilation (le nettoyer ou le remplacer);
  • Nettoyer les lieux touchés;
  • Porter un équipement de protection individuelle.

Un lieu de travail sain et sécuritaire, y compris pour la qualité de l’air !

Il est du devoir des employeurs de fournir un lieu sain et sécuritaire, et donc, de s’assurer de la bonne qualité de l’air de l’environnement de travail. 

Pour ce faire, il est important de connaitre les types de contaminants et leurs sources principales. Il est également primordial de savoir reconnaitre les signes et les symptômes reliés à l’exposition aux contaminants. 

Enfin, les spécialistes en santé et en sécurité au travail peuvent aider à trouver des solutions adéquates et durables afin de mettre en place une qualité de l’air optimale dans le but de favoriser un lieu de travail sécuritaire.

Liens utiles :