6 priorités RH pour se démarquer de la concurrence

09-09-2024
À l’heure où les employeurs du Québec jonglent avec le ralentissement économique et la pénurie de talents, quels sont les éléments à prioriser afin de se positionner en tête du peloton ?
Rédigé par :
Annie Bourque, Pratiques RH
reunion de travail

6 éléments essentiels permettent de se distinguer en matière de ressources humaines, selon Frédérick Blanchette, CRHA (conseiller en ressources humaines agréé) ayant 20 ans d’expérience et co-fondateur de la firme Solertia qui aide des entrepreneur.e.s dans leurs stratégies de rémunération globale, d’attraction et de fidélisation du personnel.

Lors de ses rencontres avec les employeurs, l’expert observe les meilleures tactiques qui permettent de bâtir une structure RH pérenne. Voici le fruit de ses réflexions.

Un contexte de frilosité économique

D’emblée, Frédérick Blanchette qualifie le climat économique actuel de frileux. En conséquence, cette perspective restreint considérablement la prise de risques.

Les employeurs ont tendance à entreprendre des projets ou changements peu coûteux, mais susceptibles d’augmenter la valeur de l’entreprise. « Le défi des organisations en ce moment, dit-il, est donc de valoriser les conditions de travail du personnel. »

Ainsi, les décideur.e.s misent sur 4 volets incontournables :

  1. La rémunération directe incluant, entre autres, les salaires aux employé.e.s.
  2. Les avantages sociaux, dont les régimes de retraite, assurances collectives, vacances, congés.
  3. Le développement professionnel qui demande de bien connaître les aspirations des membres de son équipe. Comment veulent-ils.elles évoluer au sein de leur organisation ?
  4. L’environnement de travail, soit un climat empreint de respect et une gestion bienveillante et authentique.

1. Clarifiez sa raison d’être et son offre

Frédérick Blanchette explique aux dirigeant.e.s l’importance de bien définir les objectifs de leur entreprise, leur vision et leurs valeurs.

La meilleure façon d’y parvenir, selon lui, est de conjuguer les aspirations de l’organisation avec celles de son personnel. Les salarié.e.s d’une start up en technologie, par exemple, ont sans doute des motivations bien différentes de ceux et celles œuvrant au sein de la fonction publique.

Lui-même a déjà admis en présence d’un.e décideur.e que « ce n’est pas grave si vous n’offrez pas un fonds de pension à prestations déterminées si votre main-d’œuvre cherche tout simplement à relever des défis, à évoluer professionnellement et à contribuer à votre succès. »

À l’inverse, les collègues d’une organisation gouvernementale cherchent généralement davantage la sécurité d’emploi.

« Arrêtez de vous excuser pour ce que vous n’offrez pas et mettez de l’avant ce qui vous rend unique. Qu’est-ce qui vous distingue sur le marché ? »

- Frédérick Blanchette, CRHA.

2. Prendre le pouls de son personnel

Il y a une dizaine d’années, bon nombre d’employeurs étaient réticents à l'idée de vérifier le niveau de satisfaction de leurs collaborateur.ice.s. Sans doute par souci de ne pas créer et décevoir certaines attentes.

Cependant, cette période est bel et bien révolue. « Si 300 employé.e.s participent à un sondage préparé par l’entreprise, on peut s’attendre à recevoir 1000 idées et bons commentaires », note le spécialiste. L’engagement et la générosité du personnel se manifestent par des suggestions constructives visant à améliorer le climat et/ou les opérations.

Les réponses varient d’une organisation à l’autre. Monsieur Blanchette donne l’exemple d’une usine spécialisée en métallurgie. Même en période inflationniste, les salarié.e.s privilégient l’environnement de travail aux augmentations de salaire. Là-bas, la température est confortable et il règne une grande propreté ; deux éléments grandement valorisés par le personnel habitué des milieux industriels plus arides.

Toutefois, la situation est différente chez le plus proche concurrent alors que la direction, bien intentionnée, propose des pop sicles et un salaire plus élevé afin de compenser l’intense chaleur qui peut grimper à 40 degrés Celsius, en pleine période estivale.

Ainsi, ces coups de sonde permettent à l'employeur de cerner les valeurs et les besoins de la masse salariale.  

« Toutefois, certaines organisations ont beau présenter le meilleur programme axé sur les besoins des employé.e.s, si personne ne le comprend dans l’intérieur de l’organisation, cela ne sert pas à grand-chose », déplore-t-il. 

La gestion durable des RH, c’est quoi ?

La gestion durable des ressources humaines implique de poser des actions aujourd’hui afin d’entrevoir les résultats d’ici 1, 3, 5 ou encore 10 ans.

« À titre d’exemple, comment l’intelligence artificielle va-t-elle impacter mon modèle d’affaires ? Si je ne commence pas à investir dans le développement de ma main-d’œuvre aujourd’hui, sans doute, nous allons accuser un retard d’ici 3 ans », relève Frédérick Blanchette.

3. Documenter les situations et les enjeux en entreprise

Les comités de direction conviennent de priorités organisationnelles en tenant compte d’informations crédibles à leur disposition. Avant de prendre position, les gens autour de la table évitent de se baser sur des ouï-dire : « il est possible que » , « il semblerait que », « j’ai entendu parler de telle ou telle chose ».

Pour le co-fondateur de Solertia, les anecdotes ont une valeur limitée en matière de prise de décision efficace.

De surcroît, il existe de nombreux outils technologiques qui mesurent les enjeux prévalant dans les organisations. « Lorsqu’une situation est documentée, ça permet de la mesurer concrètement, explique-t-il. Puis, du même coup, cela devient un élément sur lequel on peut agir et surtout, s’améliorer. »

4. Rédaction d’un plan stratégique pour les RH

Il s’agit d’une notion essentielle, voire incontournable.

La majorité des organisations adoptent un plan stratégique corporatif qui fixe les objectifs pour les 3 à 5 prochaines années. Ce guide préconise les actions concrètes afin de se positionner dans le marché.

Cependant, peu de décideur.e.s songent à adopter une version similaire exclusivement pour les RH. Un atout indispensable, précise Frédérick Blanchette. De plus, il n’est pas nécessaire de rédiger un volumineux rapport de 125 pages !

Ce plan peut se baser sur 3 principes :

  1. Les objectifs
    Les dirigeant.e.s énumèrent les résultats clés RH à atteindre.
  2. L’alignement sur la stratégie d’affaires
    La direction des RH se positionne sur les meilleures décisions et initiatives à entreprendre aujourd’hui afin de contribuer à l’atteinte des résultats d’affaires actuels et futurs. Ces projets ont-ils un impact sur la gouvernance, le marché, l’environnement ?
  3. Des initiatives bien définies dans un horizon de 1 à 2 ans
    Il peut s’agir par exemple d’initiatives mesurables, par exemple, des investissements dans le développement des compétences de la main-d’œuvre en lien avec l’intelligence artificielle ou la mise en place d’un système de mentorat interne.

5. Nommer les personnes porteuses et les entourer de spécialistes

En raison du climat économique difficile, les gestionnaires jouent un rôle crucial. Ce sont des personnes « assises entre deux chaises » qui subissent énormément de pression, croit Frédérick Blanchette.

En tout temps, la direction d’une entreprise repose leur confiance sur ces membres de l’équipe qui ont le mandat d’atteindre les objectifs. Puis, de leur côté, les employé.e.s ont besoin de leur expertise dans l’accomplissement de leurs tâches au quotidien.

À l’heure actuelle, de nombreux sondages mesurent le taux d’engagement de ces superviseur.e.s. Malheureusement, plusieurs ressentent un sentiment de démobilisation face à l’ampleur des obstacles dont la pénurie de main-d’œuvre.

« Je recommande aux dirigeant.e.s de s’informer sur les défis de gestion au quotidien auxquels font face les responsables de premier niveau. La priorité est de savoir comment mieux les accompagner, car certain.e.s ont peu d’expérience. Il faut les former, légitimer leur rôle, reconnaitre leur contribution et les diriger vers les bonnes ressources. »

6. Mesurer et célébrer les succès

Pris dans l’engrenage de la croissance, les leaders d’une organisation oublient parfois d’honorer les bons coups.

En réunion, les membres du comité de direction vont commencer par témoigner de la liste de problèmes survenus au cours des dernières semaines. Entre-temps, les gestionnaires mettent en place les solutions appropriées. Puis, à la prochaine rencontre, d’autres problématiques surviennent. Et rebelote.

Frédérick Blanchette conseille de mettre davantage l’emphase sur la célébration des succès d’une équipe. Chez Solertia, précise-t-il, les réunions débutent toujours sur une note positive en soulignant les réussites d’une personne ou d’un département. « Les gens ont hâte et se disent : quand va-t-on souligner mon bon coup ? »

Puis, tous et toutes applaudissent chaleureusement le succès des collègues. « La reconnaissance est importante chez nous. Au quotidien, les employé.e.s utilisent la plateforme Amélio qui permet de féliciter un.e collègue qui a offert son aide à l’équipe ou a contribué à régler un problème. » 

Ces formes de reconnaissance motivent le personnel. Fait à souligner, ces mesures sont appréciées et engendrent des dépenses minimes.

Durabilité, stabilité et rétention

En pleine croissance, de nombreux dirigeant.e.s d’entreprise et de PME peinent à conserver leurs ressources humaines. Le taux de roulement élevé entraine des dépenses faramineuses en formation du personnel.

Plusieurs perdent le cap alors qu’une stratégie claire devrait se baser sur des priorités ciblées. L’adoption des mesures mentionnées ci-haut assure la rétention des employé.e.s clés, croit M. Blanchette.

Une approche humaine, bienveillante et authentique permet aussi d’entrevoir de meilleurs résultats. « Un.e employé.e. engagé.e et compétent.e. va assurément offrir une meilleure prestation de travail qu’un.e autre démobilisé.e. qui fait du présentéisme », fait-il valoir.

Le défi des postes clés

La relève aux postes clés est un véritable défi dans les PME du Québec, note-t-il. D’ores et déjà, il faut être en mode recrutement et rétention des membres du personnel qui vont grandir dans l’entreprise.

« Si on a les bons talents, résume-t-il, on les garde en les faisant évoluer par le truchement du développement professionnel et en s’assurant de leur capacité d’apprentissage au sein de l’organisation. »

Cela signifie que l’organisation ne se sera pas obligée de remplacer systématiquement ses talents internes par des compétences acquises à l’extérieur de l’organisation.

Conjuguer les aspirations des salariés avec celles de l’entreprise

Certaines PME encaissent des succès alors que d’autres essuient des échecs en se disant qu'elles seront toujours capables de trouver de la main-d'œuvre, que personne n’est irremplaçable.

« Si un employeur met réellement son énergie à aligner les intérêts de ses employé.e.s avec les siens et fait des efforts pour le garder, pourquoi vont-ils.elles partir si l’organisation leur offre ce qu’ils.elles cherchent ? En plus, si son évolution est alignée sur ses aspirations, la personne va rester et la mémoire corporative va suivre. »

C’est pourquoi, conclut le CRHA d’expérience, il faut miser sur les besoins actuels et futurs de nos talents de façon à pérenniser leur avenir, mais aussi celui de notre organisation.