Mentorat professionnel, un atout pour l’entreprise
Au sein des organisations, des gestionnaires, recrues ou patrons vivent un moment enrichissant en côtoyant un.e mentor.e : une occasion tangible pour faire progresser sa carrière. Cette pratique devient une tendance au sein des organisations. La preuve ? D’ici les 3 prochaines années, 45 % des PME au Québec souhaitent implanter un programme de mentorat, selon un sondage mené par la Talenterie et la Fédération des chambres de commerce du Québec.
En dépit de ce nombre grandissant, plusieurs décideur.es.s hésitent à entreprendre cette démarche. Coup d’œil sur les 5 mythes liés au mentorat.
Mythe 1 : cela prend du temps
FAUX. Le mentorat représente seulement environ 1 heure par mois évalue Catherine Légaré, présidente et cofondatrice de Elo Mentorat qui propose une plateforme, des outils et l’accompagnement aux entreprises.
Avant chaque rencontre mensuelle, la personne mentorée réfléchit à ses défis et préoccupations. « Si quelque chose la tracasse, elle en parle à son.sa mentor.e qui va la soutenir et l’aider à prendre du recul. Cela a une valeur inestimable », dit-elle.
Mme Légaré suggère de voir cette pratique comme un investissement. « C’est un accélérateur de carrière entre autres pour les gestionnaires. Je pense que cela vaut la peine de le mettre à son agenda, un peu comme le gym. »
Des exemples concrets de mentorat en entreprise
Depuis 2020, Nmedia, une PME de 110 employé.e.s, spécialisée en services-conseils numériques, a recours au mentorat pour ses 40 recrues. Chacune d’elles est jumelée avec une personne qui n’est toutefois pas le.la gestionnaire immédiat.e. Le temps consacré aux rencontres varie entre 4 à 6 heures par semaine pour les trois premiers mois, soit entre 30 minutes à 1 h 30 par rencontre.
Durant cette période, le.la mentor.e transmet ses connaissances, conseils et informations pertinentes au mentor.é.e. « Cela sauve beaucoup de temps », évalue Mélanie Chouinard, vice-présidente capital humain et service à la clientèle.
Les bénéfices sont nombreux. « Chose certaine, à chaque mois, on évolue et on devient plus efficace », affirme de son côté Dr Dominique Deschênes qui a créé en 2012 le programme de mentorat au sein du Collège québécois des médecins de famille (CQMF).
Comment instaurer le mentorat au sein de son organisation?
Elo Mentorat offre une plateforme, des outils, des services d’accompagnement, de la formation aux gestionnaires et à toutes les organisations.
Mentorat Québec suggère le Circuit PME à l’intention des gestionnaires, décideur.se.s et employé.e.s.
Le Réseau mentorat propose un.e mentor.e aux entrepreur.e.s.
Mythe 2 : le mentorat n’est pas utile
FAUX. Dans les organisations, le mentorat comporte plusieurs avantages. « Les nouvelles recrues s’intègrent facilement et sont davantage performantes », observe Mélanie Chouinard de Nmedia.
En mode hybride, ces rencontres provoquent une meilleure cohésion. Un atout de taille pour la centaine d’employé.e.s de Nmedia qui travaille majoritairement de son domicile. En associant des personnalités avec des parcours différents, des liens significatifs se créent entre eux. « Lorsqu’un mentor aide à intégrer quelqu’un dans l’entreprise, cela minimise l’impact d’être isolé.e à la maison », observe-t-elle.
De son côté, la personne mentorée comprend mieux son rôle et les attentes de l’employeur. « Ces formations sont utiles et rentabilisent notre investissement », croit Mme Chouinard dont l’entreprise songe à implanter en 2024 un programme supplémentaire afin de favoriser le développement de carrière de ses salarié.e.s.
À retenir
Ainsi, 79 % des milléniaux voient le mentorat comme un élément indispensable à leur succès professionnel.
Pour qui et pourquoi ?
Depuis 10 ans, le Collège québécois des médecins de famille offre ce programme de mentorat à ses 4500 membres. Les jeunes y ont recours ainsi que ceux et celles qui vivent un changement dans leur pratique.
Ce fut le cas de la docteure Dominique Deschênes qui a été mentorée et mentore. « C’est un outil concret et efficace, dit-elle d’un ton enthousiaste. Cela permet d’améliorer son développement personnel et professionnel et donc son propre bien-être. »
Attention, avertit-elle, il ne s’agit pas là d’une expérience de psychothérapie ni de tutorat. Le.la mentor.e n’est pas un.e coach ni un.e ami.e au départ, mais peut le devenir.
« J’ai été subjuguée par la puissance du mentorat », raconte Dre Deschênes en comparant l’expérience à un voyage. « Parfois, sur notre route, il y a une tempête. Puis, on partage son expérience et ses objectifs. Cela nous rend plus fort.e.s. À la fin de l’année, on est en mesure d’observer notre cheminement et combien, nous sommes devenue.s une meilleure personne et cela rend tellement heureux.se. »
5 raisons d’offrir le mentorat
1. Accélère la progression de carrière des employé.e.s.
2. En étant bien conseillé.e.s, les mentoré.e.s ressentent un sentiment de compétence. Du coup, cela valide le choix de leur nouvel employeur.
3. Création d'un espace sécurisant et bienveillant où la recrue pose les questions qui facilite son intégration.
4. Facilite l’intégration de personnes issues de la diversité culturelle, de genres et de la neurodiversité, d’après Mélanie Chouinard de Nmedia.
5. Instaure des relations authentiques au sein d’une organisation.
Mythe 3 : les mentors sont des vieux sages
FAUX. Un.e mentor.e n’est pas nécessairement un.e expert.e ayant une feuille de route exhaustive et plusieurs années d’ancienneté. Au contraire. Des employé.e.s des générations Y et Z possèdent des expertises, méthodes de travail ou connaissances technologiques qui sont fort prisées des senior.e.s. De plus, le monde du travail évolue grâce aux habiletés et compétences de chacun.e. La collaboration entre pair.e.s est de plus en plus valorisée.
Bien souvent, le.la mentor.e est plus jeune que le.la mentoré.e.
« Je vois de jeunes gestionnaires qui ont beaucoup d’expérience à partager aux gens plus aguerris », observe Catherine Légaré, co-fondatrice de Elo Mentorat.
Au Collège québécois des médecins de famille, l’ancienneté dans la création d’une dyade a peu d’importance. « On tient compte des valeurs et des centres d’intérêt qui vont unir les personnes et c’est vrai que parfois, le.la mentoré.e est plus jeune que le.la mentor.e », indique de son côté Sophie Juignier, coordonnatrice de projets et responsable du programme de mentorat au CQMF.
Situation similaire chez Nmedia. Le plus jeune mentor est âgé de 24 ans et certains travaillent dans l’entreprise depuis seulement 3 ans. « Notre critère numéro 1 pour jouer ce rôle, c’est l’intérêt de la personne ainsi que ses capacités d’écoute et d’empathie », mentionne la vice-présidente Capital humain et service à la clientèle.
Les bienfaits d’être mentor.e
- Sentiment de se sentir utile
- Temps de réflexion sur sa propre pratique
- Valorisation et reconnaissance
- Perfectionnement de ses habilités
Mythe 4 : des formations sont déjà offertes au personnel
En 2024, plusieurs entreprises accordent une priorité au développement des compétences de leurs employé.e.s. « Toutefois, le mentorat va plus loin en répondant au besoin d’être soutenu moralement et émotionnellement au travail », soutient Catherine Légaré d’Elo Mentorat.
Soutien et formation pour les mentors
Les mentor.e.s reçoivent de la formation pour les aider à mieux exercer leur leadership. La PME de Drummondville Nmedia propose par exemple une formation sur la rétroaction constructive et positive. « Les mentor.e.s ont l’opportunité de mettre leur expertise à profit et cela les prépare à occuper d’autres postes chez nous », fait valoir Mélanie Chouinard.
De leur côté, les mentor.e.s au Collège québécois des médecins de famille bénéficient d’une formation sur leur rôle et responsabilités. Puis, au cours de l’année, il leur est possible d’échanger entre eux sur leurs bons coups ou défis. Cette communauté de pratique représente une possibilité d’apprendre au contact des autres. Par ailleurs, la certification du programme permet l’obtention de crédits de formation continue.
Une structure solide
Au sein du Collège québécois des médecins de famille, la banque de mentor.e.s compte une cinquantaine de médecins de famille passionné.e.s pour une vingtaine de places disponibles chaque année. « La clé du succès, c’est l’embauche de quelqu’un de compétent à la coordination qui offre du soutien et un suivi autant aux mentoré.e.s qu’aux mentor.e.s », explique Dominique Deschênes.
Cette personne clé est Sophie Jugnier qui met en contact les deux parties. « Il faut toutefois, et c’est le secret, précise-t-elle, que chacun.e ait vraiment envie de vivre l’expérience. Si on s’inscrit pour faire plaisir aux autres cela risque de ne pas être concluant », prévient-elle.
Le principe est simple : basé sur les objectifs de mentorat et le jugement de la coordonnatrice, la personne mentoré.e a le choix entre 3 ou 4 profils de mentor.e. Elle choisit ensuite en fonction des valeurs et intérêts en commun avec l’autre.
Les bénéfices d’être mentoré.e :
- Brise l’isolement
- Aide à devenir autonome plus rapidement
- Réduit l’anxiété
- Favorise l’acquisition de compétences, d’habiletés et un meilleur équilibre de vie
Mythe 5 : le mentorat n’a aucune incidence sur mon taux de roulement
FAUX. Les dirigeant.e.s d’entreprise ressentent un certain découragement face au taux de roulement élevé de leur personnel. Plusieurs pensent que le mentorat n’y changera rien.
Difficile de quantifier le niveau de rétention du personnel chez Nmedia. Une chose est sûre, selon Mélanie Chouinard, le roulement des nouvelles recrues a diminué de façon significative dû au dispositif lui-même, instauré en 2020.
« Notre taux de rétention est meilleur parce que les gens sentent qu’ils performent et contribuent à la croissance de l’entreprise », soutient Mélanie Chouinard.
Prévenir les départs de la profession
Au début d’une carrière, plusieurs ressentent une pression sociale et de performance. Certain.e.s vivent des épisodes de doute, voire de détresse. L’accès à un.e mentor.e évite parfois l'envie de démissionner sur le champ.
« Une jeune médecin nous a confié qu’elle songeait à quitter la profession en raison de différents enjeux », raconte Sophie Jugnier. Puis, en discutant au fil des mois avec son mentor, elle a ainsi pris du recul et obtenu une autre perspective. Finalement, elle a décidé de poursuivre son engagement en médecine. Tant mieux, car le Québec en a tant besoin!
En conclusion
En cette période de ralentissement économique, les employeurs cherchent à renforcer leur marque employeur. La meilleure façon, selon Catherine Légaré, c’est de se distinguer par une culture d’apprentissage. « J’entends souvent cette réflexion d’employeurs qui disent à leurs talents : nous souhaitons que tu puisses grandir et te développer au sein de notre organisation. »
Enfin, cette pratique favorise un environnement sain axé sur la confiance, le sentiment d’appartenance qui se traduit par un soutien et une compréhension mutuelle. Des atouts précieux pour un employeur qui veut mettre en place une culture forte tout en répondant aux besoins des employé.e.s dont l’autonomie, la compétence et l’affiliation.
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