Astuces et conseils pour réussir une vraie déconnexion au travail

Auteur.e
Annie Bourque, rédactrice
chez Pratiques RH

Des gestionnaires enchaînent jusqu'à 8 ou 9 réunions virtuelles dans une seule journée. Pire, des dirigeants envoient des courriels non urgents un samedi matin.
Il s'agit là d'une réalité dans plusieurs organisations. Il est préférable de tenir un maximum de 3 ou 4 rencontres virtuelles, selon Philippe-Richard Bertrand, président d'Illuxi qui donne des formations sur la déconnexion. Ce surplus de rencontres devient contreproductif, observe-t-il, car personne n'a plus le temps d'effectuer son travail.
En France, une loi force les employeurs à éviter tout contact avec les employé.e.s en dehors des heures de travail. « Ici, au Québec et au Canada, le droit à la déconnexion numérique est au gré des employeurs alors que selon moi, il s'agit d'une obligation morale », précise-t-il.
Pourtant en 2025, fait-il valoir, une technologie existe afin de planifier l'envoi de courriels à l'intérieur des heures normales de bureau. Quelqu'un a une idée de génie durant son jogging le dimanche matin ? Aucun problème. Un logiciel installé dans la messagerie électronique planifiera l'envoi du courriel le lundi matin à 8 heures.
Solution 1: prendre conscience de ses habitudes numériques
Les spécialistes interrogé.e.s par Pratiques RH estiment primordial de prendre conscience des habitudes numériques. L'exercice commence par un moment d'introspection et d'observation. « Je réfléchis à mes difficultés à reprendre le contrôle par rapport aux écrans. S'agit-il d'un enjeu individuel ou professionnel ? », questionne Laurie Michel, experte en cyberpsychologie, conférencière-formatrice spécialisée en bien-être numérique et fondatrice de Vivala, unefirme pionnière ayant formé plus de 150 organisations sur l'hyperconnectivité et la déconnexion à l'international.
D'abord, la question essentielle : Quel est donc le niveau de dépendance ou d'addiction aux écrans ? « Il faut évaluer les moments où l'on se fait happer par la technologie et de comprendre la raison de cette perte de contrôle lorsqu'on est en ligne », explique-t-elle.
La solution idéale n'existe pas. Il n'y a pas de bouton magique pour la déconnexion. Il faut comprendre que les outils sont conçus exprès afin de créer une certaine dépendance. Cela vient complexifier notre rapport à la déconnexion qu'il faut intégrer comme une saine habitude au quotidien, fait valoir Laurie Michel.
Les conséquences de la dépendance aux écrans
Cette dépendance aux écrans nuit considérablement au sentiment de bien-être. Plusieurs arrivent le soir dans un état de fatigue extrême.
« L'hyperconnectivité a de graves répercussions sur la santé mentale. Les organisations perdent énormément de talents qui démissionnent à cause d'une pression trop élevée et d'un épuisement professionnel »
- Laurie Michel
Un enjeu social majeur, selon elle. « Nous passons 42 % de notre temps éveillé sur Internet. Et bien que la technologie soit fantastique et améliore notre mode de vie, elle a un impact sur notre santé physique, nos relations sociales et notre productivité ainsi que l'équilibre famille travail. »
Le piège le plus envahissant au monde
Le téléphone cellulaire, à portée de main, est l'outil qui fonctionne 24 h sur 24. « Nous sommes tous piégés par cette technologie qui permet d'être rejoint.e sur une plage en vacances, ajoute Laurie Michel. Nous avons de la difficulté à dire non car inconsciemment, on sait que les autres sont au courant qu'on a reçu la notification. »
Déconnexion: mission impossible, même en vacances
65 % des 185 employé.e.s sondés par Vivala dans une dizaine d'organisations en 2024 indiquent ne pas parvenir à la déconnexion durant leurs vacances ou leurs heures de repos.
Expérience vécue: Juillet 2025. En vacances au bord d'une plage au Lac Saint-Jean. Autour du feu de camp, 3 personnes sur 5 tiennent en main leur téléphone et deux le consultent. Impossible d'utiliser le mien, il venait de tomber par maladresse dans une tasse de thé. Ouf! J'ai vécu 4 jours et 4 nuits sans mon outil de prédilection. En retour : un calme intérieur et une sensation de contrôle sur ma vie.
Effets néfastes de l'hyperconnectivité
- 40 % des personnes sondées par Vivala disent ressentir une fatigue mentale liée à la connexion numérique.
- 36 % constatent une baisse de leur capacité d’attention.
- 10 % souffrent de fatigue oculaire.
Solution 2 : encadrer la déconnexion au travail
En cette ère où les employeurs de marque cultivent l'excellence et le mieux-être, Philippe-Richard Bertrand déplore le manque de sensibilisation au droit à la déconnexion* (voir plus bas).
Seulement le quart des organisations au Québec formalise le droit à la déconnexion tandis qu'une majorité peine à définir clairement ses engagements laissant les employé.e.s dans l'incertitude, rapporte le sondage de Vivala.
Heureusement, on compte de plus en plus de PME qui donnent l'exemple. L'une d'elles, DemersBeaulne prône la politique DBranche pour une déconnexion numérique mieux encadrée.
Les équipes sont encouragées à :
- Éviter l'envoi de communications internes du lundi au jeudi, entre 20 h et 6 heures et ainsi que les fins de semaine.
- En cas d'urgence :un appel direct plutôt qu'un courriel ou un texto.
- Pas de réunion entre midi et 13 h.
- Enfin, les «marche-meetings» sont privilégiées.
Petit lexique pour néophytes
- *Définition du droit à la déconnexion: Droit pour les employé.e.s de ne pas être connecté.e.s aux outils numériques de travail, ni d'être contacté.e.s pour des motifs professionnels en dehors de leurs heures de travail.
- Politique de déconnexion: Il s'agit d'une obligation pour les employeurs ayant des représentant.e.s syndicaux d'intégrer cette politique dans la négociation collective sur la qualité de vie au travail.
- Nomophobie: Peur d'être séparé de son téléphone mobile lié au syndrome du FOMO (Fear of Missing oOut) ou peur de manquer quelque chose. Principal symptôme: anxiété en l'absence du téléphone et besoin constant de vérifier les notifications.
Solution 3: pratiquer la détox numérique au quotidien
Le président d'Illuxi Philippe-Richard Bertrand suggère de déterminer soi-même des balises afin de s'imposer un certain contrôle. D'abord, il recommande de fixer d'avance le moment pour cesser l'utilisation des écrans.
Expérience vécue: vendredi, 17h. Je pose mon téléphone dans un tiroir, le but étant de le reprendre le lundi matin. Je profite d'une belle soirée avec mes proches. Le samedi, ce fut la course habituelle: ménage, magasinage et souper. Le dimanche, impossible de résister à mon habitude de lire les dernières nouvelles. Toutefois, je me suis limitée à 30 minutes au lieu d'une heure.
De son côté, Philippe-Richard Bertrand s'impose UNE règle chaque jour.
- Lundi : n'ouvrir que les mails urgents.
- Mardi: ne pas regarder son cellulaire avant d'être arrivé au bureau.
- Mercredi : pas d'écran durant le lunch.
- Jeudi : ne pas ouvrir de courriels entre 13h et 15h.
- Vendredi : pas de médias sociaux de la journée.
Les résultats sont tangibles:
- Possibilité de s'aérer et prendre du recul par rapport au travail.
- Passer du temps avec vos proches.
- Retrouver la forme physique, car plus souvent à l'extérieur.
D'autres astuces en rafale
Non aux courriels et réseaux sociaux
Les fins de semaine, il est tentant de répondre à un courriel ou encore de jeter un coup d'œil sur Facebook ou LinkedIn, une plateforme qui nous informe d'un changement d'emploi ou de la promotion d'un.e collègue.
« Cela vient abimer son temps de récupération et de repos cognitif », déplore la présidente fondatrice de Vivala, Laurie Michel.
Durant les journées de congé, nous sommes censé.e.s se reposer. Est-ce bien nécessaire de lire sur la promotion d'un.e collègue ou la récente actualité d'un concurrent en plein dimanche ?
« Cela risque d'entrainer d'autres enjeux, pense-t-elle, dont une pression à la hausse et une estime de soi à la baisse. »
S'affranchir du zapping de contenu
Sur nos téléphones, défile une succession de titres et de photos liées à l'actualité. « On a tendance à se diriger vers des nouvelles qui vont susciter des émotions fortes ou négatives, ajoute Laurie Michel. Et cela est lié en quelque sorte, à notre instinct de survie. C'est la raison pour laquelle nous allons surconsommer les actualités. »
Sur le temps de travail, le scrolling de nouvelles devient problématique, car il nuit grandement à la concentration et à la performance. « Les effets néfastes du zapping de contenu sont visibles: diminution de la capacité d'attention et de la concentration. « Je vois des personnes autour de moi qui ont des difficultés à se poser et à lire un livre », illustre Laurie Michel.
Se réapproprier du temps pour soi
Les spécialistes Philippe-Richard Bertrand et Laurie Michel estiment nécessaire d'apprendre à se déconnecter au quotidien afin de profiter pleinement des périodes de repos.
Un temps pour se consacrer à la méditation, la lecture, des promenades à l'extérieur sans téléphone ni Podcast. Chacun.e trouve son truc pour s'éloigner des écrans. Philippe-Richard Bertrand, par exemple, pratique des marathons tandis que Laurie Michel adore se retrouver dans la forêt. En cette période automnale, elle aime observer le changement des feuilles, sentir l'odeur du boisé. « La nature etles chants des oiseaux ont un véritable pouvoir afin de réduire le stress et de stimuler notre cerveau », dit-elle.
« Cependant, en restant continuellement connecté.e.s pour notre travail ou à cause de mauvaises habitudes numériques, on perd de vue la beauté de la vie », confie-t-elle.
En savoir plus : Formations sur la déconnexion
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