Comment les nouvelles technologies révolutionnent la formation du personnel

12-05-2025
Les nouvelles technologies apportent un vent de fraîcheur et révolutionnent la formation en entreprise.
Rédigé par :
Karine Dutemple, Pratiques RH
nouvelles technologies formation du personnel

Cette nouvelle ère s’accompagne de nombreux changements : fragmentation de l’information et parcours de formation personnalisé grâce au microapprentissage en ligne, aventures sensorielles dans un environnement 3D et microcertification.

Quels sont les avantages et les défis de l’implantation des nouvelles technologies en développement des compétences ? Comment tirer pleinement profit du potentiel offert par l’innovation technologique en formation ?

L'intelligence artificielle et le microapprentissage

Matthieu Thomas est président de Cards, une entreprise spécialisée dans le domaine du microapprentissage en ligne. Cette méthode mise sur une fragmentation du contenu afin de faciliter l’apprentissage et d’améliorer la rétention de l’information.

Cards met de l’avant une technologie permettant la création de parcours de formation personnalisés et destinés aux employé.e.s. Ces derniers peuvent inclure des quiz, vidéos, sondages et des évaluations pour tester la maîtrise de nouvelles connaissances.

Quelques applications concrètes du microapprentissage

  • Quiz sur les procédures à suivre pour assurer la sécurité au travail ou pour tester la connaissance du personnel sur les produits et services offerts par l’entreprise ;
  • Sondages pour connaître l’opinion du personnel sur les formations et apporter des changements en fonction des besoins exprimés ;
  • Vidéos de présentation de l’entreprise lors de l’accueil de nouvelles personnes dans l’équipe.

En plus de la diversité de supports offerts, la technologie est disponible sur mobile et peut également être intégrée sur Teams.

Au fil de leurs parcours d’apprentissage, les apprenant.e.s peuvent obtenir des badges numériques, attestant de l’acquisition de nouvelles compétences.

Ces formations peuvent être élaborées à l’aide des connaissances du personnel, des ressources internes de l’entreprise (PowerPoint, PDF et documents divers) ou de l’intelligence artificielle.

« L’assistant de conception par intelligence artificielle a beaucoup contribué à la création de parcours de formation adaptés aux besoins des entreprises », relève l’expert en microapprentissage.

Il insiste toutefois sur l’importance de voir celle-ci « comme un outil à la disposition des formateurs », sensibilisant les organisations à la nécessité de valider l’information qu’elle fournit et de ne pas prendre un rôle passif dans l’élaboration des formations.  

Des formations immersives avec la réalité virtuelle et la réalité augmentée

Harold Dumur est le fondateur de OVA, une entreprise d’ingénierie logicielle axée sur les technologies immersives soutenues par l’intelligence artificielle. Selon lui, la réalité virtuelle et la réalité mixte représentent un grand potentiel pour la formation en milieu professionnel.  

« En raison de sa nature immersive, la réalité virtuelle favorise un niveau de rétention et de concentration impossible à obtenir autrement », explique-t-il.  

M. Dumur indique que ces technologies sont en forte hausse pour la formation des employé.e.s exerçant des métiers qui posent des enjeux de santé et sécurité comme l’industrie de l’acier et de l’aluminium, mais aussi le secteur manufacturier.  

« Chez ArcelorMittal, un de nos clients, un four en fusion peut créer une bombe à hydrogène, advenant une erreur procédurale », cite-t-il en exemple. « L’apprentissage d’une tâche motrice pour éviter des accidents graves ne peut se faire autrement qu’avec 3 dimensions. »

StellarX, produit phare de OVA, est une plateforme pilotée par l’intelligence artificielle en réalité virtuelle et mixte. Elle permet la cocréation avec l’intelligence artificielle d’un environnement où des scénarios d’apprentissage se déroulent, impliquant l’animation d’objets et des interactions entre les individus.

La nature collaborative de la formation donne au formateur l’opportunité d’intervenir directement dans le scénario, précise-t-il.

La réalité virtuelle au service de la formation : quelques exemples

  • Évaluer la réaction de futurs pompiers lors d’un incendie pour le personnel de Tactik360 ;
  • Mesurer la tension des fils dans un circuit électrique chez Hydro-Québec ;
  • Tester l’application des procédures de maintenance prédictive pour la production d’aéronefs chez Bombardier ;
  • Mettre à l’épreuve de nouvelles recrues de la sécurité publique lors d’interventions d’urgence à la Ville de Québec.

Source : OVA

La documentation de l’entreprise est utilisée pour nourrir le grand modèle de langage (LLM), un programme informatique capable de synthétiser et d’analyser les informations qui lui sont fournies. Ces dernières constituent la base du contenu transmis à l’apprenant.e lors de la formation.

« Chez ArcelorMittal, leurs documents internes sont constitués de beaucoup de PDF, ils vont nourrir le LLM à l’aide de ceux-ci. Après, cette information va être reprise lorsqu’un.e employé.e posera une question durant la formation, par exemple. »

Si des informations manquent pour l’élaboration de la formation, c’est la génération augmentée (RAG) qui prend le relais. Cette technologie est notamment utilisée pour la création d’assistants virtuels. En effectuant des recherches en ligne, elle améliore la qualité du contenu transmis et garantit une réponse plus personnalisée aux requêtes.

Une meilleure vérification des diplômes

« Les technologies décentralisées visant la vérification et la transmission de l’information comme les chaînes de blocs (blockchains) ont un gros potentiel », souligne Matthieu Thomas.

À une époque où les diplômes, certifications et microcertifications peuvent être falsifiés, la chaîne de blocs permet de contrer cette menace en facilitant les vérifications requises pour s’assurer de leur validité.  

« Alors qu’on s’intéresse davantage aux microcompétences, je crois que cette technologie va devenir de plus en plus intéressante pour les formateurs », soulève-t-il. Reconnaître tous les apprentissages sera désormais possible, même s’ils ne s’inscrivent pas dans un programme de formation de plusieurs semaines ou mois.

L’impact des nouvelles technologies sur l’apprentissage et la transmission des connaissances  

Selon le spécialiste du microapprentissage, l’implication de nouvelles technologies en formation s’accompagne d’un changement majeur concernant la transmission des connaissances.

Si autrefois les savoirs étaient directement transmis d’une personne à l’autre, l’innovation technologique permet d’optimiser la rétention de l’information.

Pour y arriver, la formation mise sur le fractionnement de l’information, l’implication active de l’apprenant.e et l’ancrage mémoriel. Ce dernier élément consiste en une suite de rappels sur des concepts clés lors d’un parcours de formation effectué en ligne.

« À la fin de la formation, les collaborateurs vont avoir pratiqué les connaissances acquises. Une routine doit être mise en place pour consolider les apprentissages afin que la transmission du savoir ne soit pas dédiée à un instant. »

- Matthieu Thomas, président et co-fondateur de Cards

Quel est donc le rôle du.de la formateur.ice dans un processus où la technologie est désormais centrale ?

« Cette personne va continuer de transmettre des connaissances, mais elle va peut-être le faire d’une manière différente, notamment en invitant les gens à pratiquer. »

Cette méthode de formation facilite grandement l’implication du ou de la salarié.e dans le processus, ce qui constitue le « moteur de l’engagement », affirme Matthieu Thomas.

« La transmission des connaissances va également prendre une forme de plus en plus ludique », ajoute M. Dumur. Si l’intégration de la réalité virtuelle et de la réalité mixte dans les formations destinées au personnel appuie cette idée, « la création d’un fantôme numérique afin que les employé.e.s puissent enregistrer et transmettre leurs connaissances avant de quitter leur emploi » figure également parmi les nouvelles avenues envisagées.

« Le transfert des connaissances spatiales est la prochaine étape », précise-t-il.

« Les formations en 3D s’appliquent très bien au transfert de compétences techniques. Ce changement est déjà en cours de transformation. »

- Harold Dumur, fondateur de OVA, spécialisée en technologie d’informatique spatiale assistée par l’intelligence artificielle

La technologie au service des emplois : avantages et défis

« Retenir et attirer le talent est de plus en plus difficile pour les entreprises manufacturières situées en région, c’est ce que j’entends auprès des entreprises qui font affaire avec nous », soulève Harold Dumur.  

Puisque la relève a grandi dans un monde où la technologie était plus présente, donner à celle-ci une place de choix dans la formation peut contrer cette problématique et encourager le personnel à rester en emploi.

Selon lui, l’emploi de nouvelles technologies en formation peut « contribuer à la notoriété et à l’image de marque, mais aussi permettre à l’entreprise de garder son avantage concurrentiel ».  

L’usage de nouvelles technologies à des fins de formation en entreprise éduque et familiarise également la main-d'œuvre avec son utilisation, améliorant du même coup la littératie technologique, fait valoir M. Thomas qui parle d’une « démocratisation de la connaissance ».

Voilà qui est d’autant plus important, si on tient compte du fait que l’intelligence artificielle, la réalité augmentée et la réalité virtuelle peuvent être plus difficiles à maîtriser pour certaines personnes, relève-t-il.

« Changer quelque chose demande du temps et il faut arriver avec une technologie qui parle aussi aux anciennes générations », poursuit Harold Dumur.  

Leur utilisation amène toutefois une interrogation : comment étendre leur usage à grande échelle, sans éviter le partage d’informations en excès ? Les spécialistes estiment que le principal défi est d’éviter la surcharge cognitive.  

D’autre part, le fondateur de Cards soulève un point important : l’emploi des nouvelles technologies en formation implique leur maîtrise au préalable par la main-d'œuvre.  

Il faut être prêt à « éduquer et à sensibiliser les employé.e.s à l’usage des nouvelles technologies afin de favoriser leur adoption », insiste-t-il.

Coûts et impact financier

L’équipement nécessaire à l’utilisation de la réalité virtuelle et augmentée demeure « abordable », estime M. Dumur, ce qui représente une opportunité pour une entreprise souhaitant se moderniser et démontrer sa capacité à suivre l’évolution technologique en matière de formation du personnel.

« Ce qui coûte le plus cher, c’est perdre un humain qui a toute sa connaissance. »

- Harold Dumur, fondateur de OVA, spécialisée en technologie d’informatique spatiale assistée par l’intelligence artificielle

Pour Matthieu Thomas, un autre avantage de nature financière doit être mis de l’avant.

« L’intégration de nouvelles technologies s’accompagne souvent d’une réduction des sessions de formation en présentiel. Cela est synonyme d’une optimisation des coûts relatifs aux anciennes infrastructures pédagogiques ou andragogiques », affirme-t-il.

Les nouvelles technologies en formation : un potentiel à ne pas sous-estimer

L’emploi de nouvelles technologies en formation évoque une nouvelle vision de l’apprentissage.

Suscitant un impact positif pour la rétention du personnel et la consolidation d’une marque employeur reflétant l’innovation, nul doute que la formation continuera à sortir des sentiers battus !