Grignotage au bureau: encourager des choix équilibrés sans culpabilisation

06-03-2025
9h30 : Premier café.
10h45 : Quelques noix… ou un biscuit ?
12h45 : Déjeuner devant l’écran.
15h00 : Coup de fatigue… un beigne !
17h30 : Dernière réunion, besoin de sucre !
Rédigé par :
Victoire Bejjani, Pratiques RH
collation au travail

Une journée de travail est rythmée par les réunions, les écrans… et ces petites fringales qui s’invitent sans prévenir. 15h00, coup de fatigue. L’énergie chute, et l’appel du sucre se fait sentir. Collation réconfortante ou option équilibrée ? Le choix semble anodin, mais il influence bien plus que la faim : productivité, humeur, concentration dépendent énormément de l’alimentation. 

Au Québec, 54 % des adultes ne consomment pas assez de fruits et légumes. L’enjeu n’est pas de bannir certains aliments ni de culpabiliser, mais de rendre les options saines aussi accessibles et appétissantes que les alternatives gourmandes, conformément aux recommandations du Guide alimentaire canadien

Comme le souligne si bien Sarah Normandin, nutritionniste-diététiste clinicienne : « il ne s’agit pas de transformer les bureaux en centres de nutrition, mais de faire des choix sains une évidence. » 

Un défi ? Peut-être. Une mission impossible ? Certainement pas !

Des collations qui boostent l’énergie et la concentration

Si seulement une bouchée pouvait propulser instantanément l’efficacité lorsque l’énergie n’est plus au rendez-vous… Malheureusement, la science n’a pas encore trouvé cette merveille (et non, le café ne compte pas !). 

Mme Normandin l’explique bien : « les glucides complexes fournissent une énergie plus stable et durable, tandis que les protéines ralentissent l’assimilation du sucre, évitant ainsi le coup de fatigue brutal. C'est un peu comme mettre un additif dans le carburant d'une voiture pour qu'il dure plus longtemps ! » 

À noter que...

Une étude de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) indique qu'une alimentation équilibrée peut améliorer la productivité des employé.e.s de près de 20 %.

Autrement dit, l’idée n’est pas simplement de calmer une fringale, mais d’offrir au corps un carburant efficace pour rester performant plus longtemps.  

Après tout, « on ne mange pas seulement pour se nourrir, on mange aussi pour se sentir bien », rappelle Sarah Normandin. 

Mais attention, tous les choix ne se valent pas : 

  • Les collations sucrées (barres chocolatées, biscuits, sodas) donnent un regain de vitalité… avant de provoquer un « crash » brutal qui exacerbe encore plus le coup de fatigue
  • Les aliments ultra-transformés (chips, viennoiseries, aliments issus de la restauration rapide) sont souvent riches en gras et en sel, ce qui alourdit la digestion et nuit à la concentration. 

Bonne nouvelle : on peut recharger ses batteries sans nuire à ses performances ! L’astuce ? Choisir des collations associant glucides complexes et protéines, comme une pomme avec des amandes, pour une énergie durable et un esprit alerte. 

Encourager les bons choix sans restriction

Ainsi, pour favoriser des choix judicieux en entreprise, mieux vaut adopter une approche plus souple et positive. Après tout, fixer des règles trop strictes risque d’avoir l’effet inverse : plus un aliment est restreint, plus il devient tentant

Sarah Normandin met en garde contre cette approche : « quand on qualifie certains aliments de « mauvais », on risque de créer un effet de restriction cognitive, où les employé.e.s vont paradoxalement désirer encore plus ce qu'on veut leur faire éviter. » 

Comment favoriser les collations équilibrées sans frustration ?

  • Miser sur la visibilité : un panier de fruits dans la salle de repos, des yogourts et du fromage en libre accès, des collations saines à portée de main…  
  • Repenser les distributeurs : remplacer les collations ultra-transformées par des options nourrissantes comme des noix, des barres aux céréales complètes ou du houmous avec des crudités. 
  • Sensibiliser avec légèreté : ateliers pratiques, astuces nutrition simples, mini-défis bien-être…

Fruit O Bureau : Des équipes qui croquent la santé

La demande pour une alimentation plus saine en entreprise ne cesse de croître. Martin Goyette, directeur des ventes et opérations chez Fruit O Bureau, le constate chaque jour : « nous voyons une forte tendance des entreprises qui souhaitent améliorer l’aspect santé des options offertes à leur main-d'œuvre. »  

Aujourd’hui, son entreprise livre plus de 1 100 paniers chaque semaine à environ 450 entreprises de Montréal et Québec, parmi lesquelles Bell Media, Ubisoft, Desjardins, La Presse, Veolia, Expedia et bien d’autres. 

« Les PME, même avec un budget restreint, peuvent aussi certainement profiter de nos services », assure Martin Goyette.

3 $ par employé.e et par semaine suffisent pour offrir une collation saine à ses équipes. 

« Si vous regardez le prix par fruit, qui se situe entre 1,10 $ et 1,29 $, offrir un fruit par employé.e revient moins cher qu’un café ou une viennoiserie sucrée, qui causera un « crash » d’énergie », explique-t-il. 

Attention au grignotage émotionnel 

Mais toutes les collations en entreprise ne sont pas choisies par faim ou souci de bien-être. Le stress joue un rôle clé dans les comportements alimentaires. 

Une réunion qui s’éternise, un échéancier serré, un dossier qui vire au chaos… et voilà qu’une main se tend instinctivement vers un biscuit (ou deux, ou trois). 

« Sans stratégies pour gérer le stress autrement, le grignotage au bureau devient un automatisme difficile à briser. »

- Sarah Normandin

En entreprise, des solutions existent pour éviter que la salle de pause ne se transforme en zone de compensation alimentaire : 

  • Aménager de vrais espaces de détente : un coin calme avec fauteuils confortables aide à relâcher la pression autrement qu’en grignotant. 
  • Encourager les pauses actives : 5 minutes de marche, quelques étirements, une vraie respiration, etc. Parfois, c’est tout ce qu’il faut pour couper une envie de sucre. 
  • Mieux comprendre le lien entre émotions et alimentation : identifier ses habitudes permet déjà d’adopter des comportements plus équilibrés. 

Travailler en mangeant : bonne ou mauvaise idée ?

Manger devant son écran pour « gagner du temps » ? Pas si efficace qu’on le pense ! 

« Prendre une vraie pause améliore la digestion et aide à mieux réguler sa faim. Devant un écran, on mange souvent plus sans s’en rendre compte ! » – Sarah Normandin

Sensibiliser à une alimentation plus saine en entreprise 

Mais au-delà du grignotage et des repas pris à la va-vite, comment encourager de meilleures habitudes alimentaires en entreprise ?

Vanessa Daigle, nutritionniste-diététiste, accompagne régulièrement les organisations dans cette démarche. « Le mois de mars est le Mois de la Nutrition, et plusieurs entreprises en profitent pour organiser des activités sur cette thématique. », précise-t-elle. 

Ces actions s’intègrent souvent à des événements ponctuels, comme la Semaine santé et sécurité ou d’autres campagnes de sensibilisation en entreprise. Parmi celles ayant mis en place ce type de programme l’an dernier, on retrouve Hydro-Québec, la Sûreté du Québec, Soprema, Hitachi, l’Ordre des ingénieurs du Québec et l’Association portuaire du Québec. 

« Les employeurs sont toujours ravis de voir leurs employé.e.s s’impliquer et se mobiliser autour de ces sujets », indique Vanessa Daigle « D’ailleurs, lorsqu’ils sondent leur personnel sur les thématiques qui les intéressent, la nutrition revient très souvent. » 

Et l’hydratation dans tout ça ?

Le cerveau a parfois du mal à faire la différence, et une légère déshydratation peut vite se traduire par des fringales inutiles, une baisse d’énergie et des difficultés de concentration. 

Mme Normandin rappelle que : « le cerveau confond souvent soif et faim. Boire régulièrement tout au long de la journée peut réduire les grignotages inutiles. » 

Des astuces pour favoriser l’hydratation au bureau :

  • Installer des fontaines à eau filtrée pour encourager la consommation régulière. 
  • Proposer des alternatives plaisantes : eau pétillante, infusions, eau aromatisée naturellement (citron, menthe, gingembre, etc.). 
  • Encourager l’usage de bouteilles réutilisables : avoir de l’eau à portée de main incite à boire sans même y penser.

De son côté, la FCCQ a offert des bouteilles réutilisables à ses employé.e.s. Moins de café, plus d’hydratation ! 

De plus en plus d’entreprises choisissent des alternatives saines pour rester hydratées tout en maintenant leur énergie.  

Nicolas Beaupré, fondateur et PDG de Matéina, souligne que « plusieurs entreprises au Québec ont intégré Matéina dans leur environnement de travail depuis plusieurs années. Parmi elles, on retrouve CPA Levesque, GL Électrique, Boléan, Modulable, Oraki, C’est Beau et Workleap. La tendance est définitivement en croissance, et les retours sont très positifs, notamment en termes d’énergie soutenue et de bien-être des employé.e.s. » 

Manger local : un petit geste qui change tout !

Encourager une alimentation plus saine en entreprise, c'est bien. Miser sur des produits locaux et de saison, c'est encore mieux ! En plus de favoriser la fraîcheur et la qualité des aliments, le local soutient l'économie d'ici et réduit l'empreinte écologique des repas au bureau. 

Avec les tensions actuelles entre les États-Unis et le Canada, mieux vaut ne pas trop compter sur les importations américaines pour remplir les frigos du personnel. 

Sans parler du fait que les produits du terroir québécois n'ont rien à envier à ceux d’ailleurs : pommes croquantes, fromages savoureux, noix locales, pains artisanaux, etc.  

Bref, encourager la santé de ses employé.e.s, de l’économie locale et de la planète, voilà trois bonnes raisons d’intégrer des options alimentaires locales au bureau.  

Après tout, les spécialistes s’accordent pour affirmer que bien manger au travail, c’est aussi travailler mieux.