Parole d’expert : « Un des objectifs du RVER, c’est de créer des habitudes d’épargne. »

04-11-2025
Thématiques : Salaire et travail  -  Parole d’expert
À la suite de l’entrée en vigueur de la Loi sur les régimes volontaires d’épargne-retraite, certains employeurs sont tenus d’offrir ce véhicule d’épargne à leurs employé.e.s.
Karine Dutemple

Auteur.e

Karine Dutemple, rédactrice
chez Pratiques RH

Famille de couple d’âge moyen mature femme et mari comptant les fonds, les déclarations d’épargne, les investissements, la paperasse, les documents financiers, la faillite, le procès, les factures, la pension avec ordinateur portable.

En quoi consiste cette obligation pour l’employeur et quels sont les avantages pour la main-d'œuvre québécoise ?  

Jonathan Bolduc ainsi que Frédéric Lizotte, respectivement directeur général des régimes complémentaires de retraite et porte-parole et chef de division du conseil et stratégies, relations publiques et médias sociaux chez Retraite Québec, répondent à cette question. 

Le régime volontaire d’épargne-retraite

PRH : En quoi consiste le régime volontaire d’épargne-retraite ?

Jonathan Bolduc : C'est un régime d'épargne collectif créé par le gouvernement québécois en 2014 et destiné aux travailleurs et travailleuses dont l’employeur n’offre pas déjà un régime d’épargne collectif.  

Toutefois, le régime est accessible à tous et toutes, soit par le biais de l'employeur, soit directement auprès de l'administrateur. L'objectif est de permettre aux salarié.e.s d’augmenter leur épargne à faible coût grâce au plafond sur les frais imposés par la Loi sur le régime volontaire d’épargne-retraite. L’adhésion est automatique, mais l’employé.e peut ensuite changer son niveau de participation.  

Frédéric Lizotte : Si la personne décide d’y adhérer, tout peut se faire automatiquement : le prélèvement sur la paie, la cotisation de 4 % et l’option de placement prévue par défaut. Le travailleur ou la travailleuse peut se rendre dans son profil et modifier ces différents paramètres. 

PRH : Sous quelles conditions un employeur est-il obligé d’offrir le RVER et qui sont les employés admissibles ?

J.B. : Actuellement, la Loi sur les régimes volontaires d’épargne-retraite s'applique aux employeurs sous juridiction provinciale comptant au minimum 10 employé.e.s. S’ils n’offrent pas déjà un régime complémentaire de retraite, un REER ou un CELI collectif, ils sont tenus d’offrir le régime volontaire d’épargne-retraite avec des prélèvements sur la paie. Toutefois, l’employeur n’est pas obligé de cotiser dans le régime. 

Les employé.e.s admissibles doivent remplir plusieurs conditions : avoir 18 ans, le statut de salarié.e tel que défini dans la Loi sur les normes du travail ainsi qu’un an de service continu. 

PRH : Comment se déroule la gestion du régime ?

J.B. : La majorité du travail est fait par l’administrateur, lequel est souvent une compagnie d’assurance de personnes. L’employeur doit percevoir les cotisations, puis les remettre à l’administrateur du RVER qui s’occupera de placer les fonds en fonction de l’option de placement sélectionnée par les participant.e.s. 

L’option « cycle de vie » permet d’ajuster les placements en fonction de l’âge du travailleur ou de la travailleuse. Cela tient compte de la tolérance variable au risque, qui peut être plus ou moins élevée en fonction du stade auquel se trouve cette personne dans sa carrière. 

Par défaut, la cotisation est de 4 %. Le régime se gère automatiquement, sans intervention de l’employé.e, à moins que cette personne décide de changer son option de placement, son taux de cotisation ou bien qu’elle souhaite se retirer du régime. 

D’autres options de placement

En plus de l’option par défaut, le régime offre aux employé.e.s entre 3 et 5 autres options de placement, lesquelles permettent d’adapter le portefeuille en fonction de leurs besoins. 

Pour ces autres options, les frais diminuant le rendement du régime ont un plafond maximum de 1.5 %.  

Source : Retraite Québec - Le régime volontaire d’épargne-retraite (RVER)  

PRH : Pour un employeur devant offrir le RVER, quelles sont les démarches à effectuer ?

La première étape consiste à choisir un administrateur parmi la liste des fournisseurs autorisés par Retraite Québec. Ensuite, le contrat avec le fournisseur sélectionné doit être signé, l’information pertinente transmise aux salarié.e.s et l’inscription des personnes admissibles doit être faite.  

Enfin, les cotisations doivent être perçues, puis transmises à l’administrateur du régime. 

PRH : Quels sont les avantages d’offrir le RVER ?

J.B. : Tout d’abord, il est particulièrement facile pour l’employeur d’ouvrir un régime volontaire d’épargne-retraite puisque la majorité des obligations reviennent à l’administrateur. Pour l’employé.e, il ne suffit que de s’inscrire et la gestion du portefeuille se fait d’elle-même grâce à l’option de placement« cycle de vie », dont nous avons parlé précédemment.  

« Les régimes collectifs d'épargne sont basés sur la mise en commun de l’épargne, donnant ainsi accès à une gestion professionnelle à frais plus avantageux. »

- Jonathan Bolduc, directeur général des régimes complémentaires de retraite chez Retraite Québec

Un autre des avantages de cette option, c’est vraiment le plafond sur les frais. En général, le rendement net qui peut être fait sur les placements implique des frais qui peuvent varier entre 2 et 4 %.  

Toutefois, le RVER a un plafond maximum de 1.25 %. Donc, l’écart de frais augmentera directement le rendement du participant ou de la participante, ce qui peut avoir un impact majeur sur l’épargne accumulée en 20 ou 30 ans.  

Étant donné qu’il s’agit d’un régime collectif, le risque de prendre de mauvaises décisions d’investissement est également réduit. De surcroît, le régime donne droit à une économie d’impôts pour le.la participant.e, comme cela est le cas avec un REER traditionnel.   

« On encourage fortement les entreprises à offrir un régime d’épargne à leurs travailleurs et travailleuses. C’est encore mieux si elles peuvent y cotiser, mais au moins l’offrir, c'est important. »

- Frédéric Lizotte, porte-parole et chef de division du conseil et stratégies, relations publiques et médias sociaux chez Retraite Québec

Il est également intéressant de savoir que la cotisation de l’employé.e peut être utilisée pour le régime d’accession à la propriété (RAP) ou pour financer un retour aux études. Enfin, les cotisations de l’employeur sont exemptées de taxes sur la masse salariale, ce qui est un avantage de taille pour celui-ci. 

Saviez-vous que…

Le gouvernement du Québec est en train de mettre en place des règles pour permettre une nouvelle option de décaissement dans les régimes de retraite : la rente viagère à paiements variables, qui sera autorisée dans le RVER.

Cette solution offrira un revenu à vie tout en profitant des rendements du marché. Des sommes d’autres véhicules d’épargne comme le REER pourraient même y être utilisées. 

F.L. : Le régime volontaire d’épargne-retraite permet également de créer de saines habitudes d’épargne, ce qui n’est pas sans importance. De plus, si l’employeur décide de cotiser, cela peut fidéliser ses salarié.e.s et attirer de nouvelles personnes dans ses rangs. 

PRH : Quand l’employé peut-il avoir accès aux cotisations de l’employeur ?

J.B. : Les cotisations de l’employeur sont immobilisées et ne peuvent généralement pas être retirées avant 55 ans. À ce moment, les sommes devront être transférées dans un compte de retraite immobilisé (CRI) ou un fonds de revenu viager (FRV).  

S’il y a une cessation d’emploi, l’employé.e peut conserver les sommes accumulées dans le RVER ou les transférer dans un de ces deux véhicules. 

PRH : Si l’employeur ne respecte pas l’obligation d’offrir le RVER, à quelles conséquences s’expose-t-il ?

J.B. : C’est la CNESST qui surveille le respect de cette obligation de la part des employeurs. Si le personnel constate que le RVER n’est pas offert au sein de son entreprise, bien que cela devrait être le cas, il peut ouvrir le dialogue avec l’employeur à ce sujet.  

En cas de non-conformité à cette mesure, une plainte peut être faite à la CNESST et l’entreprise pourrait être mise à l’amende, laquelle peut aller jusqu’à 10 000 $.