Reconnaître autrement que par l’argent

10-02-2023
Au-delà des primes et des augmentations salariales, l’appréciation non pécuniaire est avant tout une question de rapport humain entre l’employé, l’équipe et l’entreprise, dont le but ultime est d’accroître le sentiment d’exister, de contribuer et d’être utile chez la personne reconnue.
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Mélanie Brunette, CRHA / CC Consultants – Conseil et créativité
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Reconnaître autrement que par l’argent

La reconnaissance au travail prend différentes formes : formelle ou informelle, publique ou privée, individuelle ou collective, monétaire ou non. Que ce soit par des éloges sincères, du temps de qualité, l’entraide et quelques privilèges tangibles la reconnaissance non monétaire se pratique au quotidien. Cet article présente des exemples concrets à mettre en application afin que vos pratiques de gestion deviennent un levier de performance et une source de valorisation inestimable dans vos équipes!

Les bienfaits de la reconnaissance

Se sentir apprécié dans son travail est un besoin fondamental auquel se rattachent de nombreux bienfaits à la fois pour la personne reconnue, pour l’équipe et pour l’organisation.

En effet, en plus de contribuer à l’estime de soi et à l’épanouissement personnel des employés en les aidant à mieux connaître leurs forces et défis, la reconnaissance au travail agit comme un levier de performance et de qualité en incitant la personne à donner le meilleur d’elle-même. Elle stimule le désir de faire bouger les choses et de contribuer au succès de l’équipe.

Dans cette même ligne d’idée, la reconnaissance favorise une ambiance de travail positive et le développement du sentiment d’appartenance au groupe. Son impact se voit également sur la réduction du taux de roulement en favorisant la loyauté et la rétention des employés compétents.

Une reconnaissance démontrant la cohérence entre l’individu et les rôles qu’ils assument favorise d’ailleurs une meilleure santé psychologique en réduisant le stress au travail et l’épuisement professionnel. Élément non négligeable considérant que le manque de reconnaissance représente la 2e source de stress la plus importante au Québec, juste après la surcharge de travail[1].

Au niveau organisationnel, la reconnaissance permet de valider nos actions et nos méthodes de travail en stimulant l’innovation et la créativité. Elle augmente aussi la fidélisation des clients par une meilleure qualité des services offerts[2].

Les 4 leviers de la reconnaissance

Jean-Pierre Brun, professeur et titulaire de la Chaire de recherche en gestion de la santé et sécurité du travail de l’Université Laval, établit quatre (4) pratiques de reconnaissance au travail [3] permettant de répondre au besoin fondamental de tout individu d’être reconnu à la fois pour sa singularité comme personne à part entière, pour les résultats produits, en passant par les efforts déployés et la façon dont il exécute son travail.

Voyons-les plus en détail avec, à l’appui, quelques exemples d’actions concrètes à peu ou faibles coûts :

La personne 

Ce type de reconnaissance est axé sur la reconnaissance de l’individu, et ce dans le respect de ce qu’il est que ce soit au niveau physique, psychologique, affectif ou cognitif. On s’adresse à « Mathieu » et non au conseiller en ventes en stimulant le sentiment d’exister, d’appartenir, d’influencer et d’apporter une valeur ajoutée dans l’organisation. La reconnaissance de la personne, que l’on appelle également existentielle, est à la base des autres formes de reconnaissance.

Exemples :

  • Aménager les horaires pour offrir plus de flexibilité et concilier travail et vie personnelle.  
  • Saluer ses collègues, dire merci.
  • Considérer les employés à temps partiel de la même façon que les temps pleins.
  • Consulter le personnel et les informer des décisions prises.
  • Informer sur les objectifs de ventes et les stratégies d’affaires.
  • Avoir des conversations de qualité, apprendre le nom des conjoints et des enfants (et s’y intéresser!).
  • Célébrer les anniversaires de naissance et d’embauche par un diner, un mot sur le babillard, une carte, etc.
  • Offrir du temps à des employés qui s’impliquent bénévolement dans la communauté ou appuyer un employé dans son équipe sportive (ou autre).
  • Considérer les aspirations de carrière et encourager la formation et le perfectionnement.
  • Offrir des collations santé, du café, thé ou jus ponctuellement ou en permanence.

Les pratiques au travail 

Cette pratique est axée sur la qualité professionnelle, les comportements, compétences, attitudes et méthodes de travail mis de l’avant dans l’exécution du travail. Elle permet de valoriser la créativité, l’innovation, l’autonomie, l’efficacité, les relations avec les clients, etc.

Exemples :

  • Permettre aux employés de prendre des initiatives et les reconnaître sincèrement.
  • Reconnaître les idées suggérées par les employés et les soutenir dans leur réalisation.
  • Permettre aux employés qui ont des talents spéciaux de les utiliser pour un projet d’entreprise (ex. : photographier les produits pour alimenter les réseaux sociaux).
  • Déléguer certaines tâches en laissant le choix des moyens pour y arriver.
  • Octroyer plus d’autonomie dans la prise de décision.
  • Reconnaître l’expérience des plus anciens en favorisant le mentorat.
  • Attribuer les projets en fonction des forces et expertises de chacun.

L’effort dans le travail 

Davantage symbolique, cette pratique est axée sur le niveau d’investissement et d’énergie déployée indépendamment des résultats (parce qu’on le sait, les résultats ne sont pas toujours proportionnels aux efforts fournis). Ce levier de reconnaissance permet de reconnaître les employés moins performants ou moins « visibles » en prenant en compte les plaisirs, les risques encourus, le désir de réussite, etc.

Exemples :

  • Offrir des repas à la fin d’un projet exigeant, la prise d’inventaire, ou après des heures supplémentaires.
  • Souligner et applaudir en rencontre d’équipe la contribution des gens impliqués dans un projet.
  • Organiser une activité physique (ex. : yoga) ou offrir des massages gratuits pendant une journée.
  • Partager les commentaires d’appréciation des clients et fournisseurs.
  • Souligner le maintien de l’ambiance de travail de l’équipe malgré les obstacles rencontrés.
  • Rédiger des cartes de Noël personnalisées pour les remercier de leur implication dans l’année.
  • Aménager un coin confortable pour les pauses (revues, fauteuil, casse-têtes).

Les résultats 

La reconnaissance des résultats est axée sur le produit final, les réalisations mesurables, observables et contrôlables, telles que « Augmentation de 15 % des ventes par rapport à l’an dernier, ouverture d’un nouveau point de vente, fidélisation d’un client ». Il s’agit d’une appréciation concrète et directe souvent reliée à des récompenses monétaires (ex. : commission ou prime).  Elle doit idéalement être jumelée à d’autres formes de reconnaissance pour éviter de créer de la compétition, de la jalousie ou un sentiment d’injustice.

Exemples :

  • Afficher les lettres ou courriels des clients satisfaits.
  • Écrire les bons coups d’un employé ou d’une équipe sur une ardoise.
  • Offrir une lettre de félicitations écrite par la direction ou le siège social.
  • Célébrer les réussites de diverses façons (ex. : lors d’une rencontre d’équipe, sur les réseaux sociaux).
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Les caractéristiques essentielles d'une reconnaissance de qualité 

La combinaison des règles d’or suivantes est indispensable afin d’accroître les impacts positifs de la reconnaissance sur l’individu et l’équipe de travail :

Précise : Spécifiez le pourquoi « merci pour… » et définissez clairement les critères de performance. Si vous souhaitez que l’employé réitère, il doit savoir quels sont les comportements à reproduire.

Personnalisée : « Il faut connaître pour reconnaître ». Formulez la reconnaissance dans les mots et de la façon dont l’employé souhaite la recevoir. Demandez-leur de quelle façon ils souhaitent être reconnus.

Immédiate : N’attendez pas le meilleur moment, saisissez les opportunités à court terme et le plus près possible de l’évènement. Vous serez alors plus en mesure d’être précis dans votre reconnaissance.

Sincère : Soyez authentique et ressentie. C’est la qualité de vos relations et l’intérêt sincère qui la rend crédible. Autrement, la reconnaissance perdra de la crédibilité aux yeux de ceux qui croient faire une différence si les gestes de reconnaissances sont aléatoires ou le fruit du hasard.

Constructive : Démontrez les améliorations et le développement des compétences.

Cohérente : La reconnaissance est plus qu’une simple procédure ou une série de gestes automatiques. Pour donner un sens, elle doit être sincère, refléter les valeurs de l’entreprise et être alignée aux objectifs et priorités de l’entreprise.

Légitime : Assurez-vous qu’elle soit offerte par quelqu’un de significatif et adaptée au contexte. Les gestes de reconnaissance doivent s’adresser aux bonnes personnes.

Équilibrée : Soyez constant et alternez entre les types de reconnaissance pour bien répondre aux besoins individuels. L’humain accorde un intérêt à la nouveauté davantage qu’à la routine, la diversité des moyens est bienvenue.

En conclusion : la reconnaissance, une responsabilité partagée

En conclusion, pour accroître les bienfaits, la reconnaissance se doit de faire partie de la culture de l’entreprise et être vue comme une activité stratégique déployée par de petites actions au quotidien. Que ce soit dans le cadre d’un programme formel de reconnaissance ou non, cette responsabilité se partage et doit être encouragée.

Gestionnaires, collègues, clients et fournisseurs, chacun joue un rôle clé dans la gratitude offerte au sein d’une organisation et il existe de nombreuses façons de le faire simplement et à faibles coûts. Encouragez vos équipes à s’approprier et entretenir un milieu de travail reconnaissant en continu. La reconnaissance provenant des pairs est d’ailleurs la plus crédible, car elle est source de confiance en soi, et peu susceptible d’être attribuée à du favoritisme ou de l’injustice.


Références

1. Entreprises Québec (2018) Santé mentale au travail : prévention et moyens d’action.
2. EnviroCompétences (2017). Guide de reconnaissance au travail.  15 pages.
3. BRUN, Jean-Pierre et Ninon Dugas (2015). « La reconnaissance au travail : analyse d’un concept riche de sens ». Gestion, vol. 30, no 2, pages 79-87