Valoriser la langue française par l’humour
Dans le Bas-Saint-Laurent, on le connait comme « Le Scribe », soit l’auteur de capsules au journal du collège et depuis cet automne, à la radio locale.
En 2018, M. Dumais s’est démarqué par l’originalité de ses affiches lors d’une campagne de promotion de la langue française. Sur un ton empreint d’humour, il note les subtilités, inexactitudes ou erreurs de notre langue.
Son succès transcende alors les frontières. Des établissements du primaire, secondaire et collégial du Québec et plusieurs écoles francophones de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Saskatchewan ont repris ses affiches. Des institutions gouvernementales et des entreprises ont téléchargé ses images partout au Canada.
« On critique souvent le français des futurs enseignants, des jeunes ou encore celui utilisé dans certains médias. Il faut créer un mouvement de fierté pour la langue française. »
Benoit Dumais, enseignant et agent de valorisation de la langue française, Cégep de Rivière-du-Loup
Plaisir et humour
L’enseignant de 43 ans croit que le sentiment de fierté pour la valorisation du français au Québec passe inévitablement par le rire, l’émotion, l’humour.
Dans sa classe, il utilise des outils technologiques dont des vidéos, un tableau interactif et a recours aux «mèmes» humoristiques, c’est-à-dire des blagues éphémères largement diffusées sur les réseaux sociaux.
C’est en 2019, en lisant un article de l’Actualité, qu’il découvre alors le potentiel de ce nouveau moyen de communication qui vise à illustrer des fautes d’orthographe fréquentes comme «héro» qui s’écrit toujours avec un s pour héros.
Au quotidien, M. Dumais prend en note les erreurs de français qui lui égratignent parfois les yeux ou les oreilles. Puis, l’idée créatrice surgit au cours d’un trajet en voiture ou d’un jogging à Saint-Pascal.
En entrevue zoom, il montre une feuille noircie de mots dont «collision versus collusion», «manicure/manucure». Puis, il cherchera des images percutantes pour réaliser son «mème». Son impact est lié au concept mnémotechnique qui aide la mémoire par les procédés d’association mentale facilitant l’acquisition de souvenirs.
« Lorsque je ris ou quelque chose me frappe, explique-t-il, cela me rentre dans la tête. Au moment d’écrire le mot, je vais douter en raison de cette image qui m’a fait rire, choqué ou bouleversé. »
Du coup, l’apprentissage du français devient plaisant et ludique. Pas question de diaboliser la langue en pointant constamment les erreurs.
Inspirer les entreprises
L’enseignant de littérature aide les entreprises de Rivière-du-Loup, membres de la Chambre de commerce locale à améliorer leur français. « Je leur rappelle par exemple qu’«entre autres» prend toujours un s», illustre-t-il.
De son côté, la PDG de de la Chambre de commerce de Rivière-du-Loup, Claudette Migneault souligne la contribution du collège depuis 50 ans dans la communauté. « Son engagement est indéniable dans le développement de notre région. De plus, sa capacité innovante à développer des formations adaptées aux besoins actuels en employabilité tout comme sa collaboration avec les partenaires du milieu est sans contredit le reflet d’un tel succès », témoigne-t-elle.
M. Dumais espère que des entrepreneurs ou gestionnaires de ressources humaines, ailleurs au Québec, reprennent son concept. « Il suffit de prendre le temps de recenser des erreurs courantes qu’on voit dans les CV, conférences et on ajoute des images choc.»
Des garagistes, salons de coiffure, entreprises de climatisation, cliniques de santé pourraient réutiliser ses «mèmes» qui reflètent la culture populaire. Il réfléchit tout haut à cet éventuel projet. «Tant mieux, dit-il, si on peut sensibiliser les gens à la langue française par la notion de plaisir ou par le sourire.»
M. Dumais souhaite que ses «mèmes» soient repris par les garagistes, coiffeurs et la communauté d'affaires.
Notoriété internationale
M. Dumais avoue être un peu dépassé par l’engouement suscité par son projet. Aujourd’hui, il compte 6080 abonnés sur Instagram provenant du Québec, mais aussi de la France, Belgique, Louisiane et autant sur Facebook.
L’année dernière, il a été invité à prononcer une conférence virtuelle à l’Institut français de Paris. Il a expliqué sa démarche devant des participants provenant de plus de 30 pays.
Mouvement de fierté
Des confrères enseignants parlent de lui comme étant un influenceur. D’autres le comparent à une bougie d’allumage ou un réveilleur de conscience. « Ce qui me rend fier, confie-t-il, ce sont les gens qui s’intéressent à mes idées et les partagent sur les réseaux sociaux et du coup, ils diffusent la fierté de la langue française. »
M. Dumais observe la richesse de notre culture qui est palpable par le nombre de chanteurs, d’écrivains, de cinéastes et d’auteurs de téléséries.
« Il ne faut pas perdre cette fierté, ajoute-t-il, car c’est le fondement de notre identité. Au Québec, la définition de notre culture, c’est la langue française. Si on perd la langue française, on devient des Canadiens comme les Ontariens ou les gens du Manitoba et on va tous parler anglais. »
Lauréat de l’excellence en français - Grande entreprise
Ce Mercure récompense une entreprise dont la réalisation marquante fait progresser le français ou le met en valeur dans un commerce, un milieu de travail ou un secteur d’activité. Professeur de littérature au Cégep Rivière-du-Loup, Benoit Dumais, lauréat du Mercure de l’excellence en français inspire ses étudiants, mais aussi les parents, enseignants et de nombreux entrepreneurs. Humoristique et positive, sa campagne publicitaire visant à corriger les petites fautes du quotidien a eu un impact réel sur la qualité du français.
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Courriel : benoit.dumais@cegeprdl.ca