5 tendances en management au Québec qui resteront en 2023

26-09-2022
Quelles sont les grandes tendances en management à l’automne 2022 alors que les employeurs sont toujours confrontés à l’enjeu crucial de la rareté de main-d’œuvre? Voici les points de vue de deux spécialistes en développement organisationnel au Québec, Josée Marcotte et Michel Maletto, CRHA, Distinction Fellow.
Rédigé par :
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Annie Bourque, Pratiques RH
Pratiques RH et les tendances en développement organisationnel

Le contexte de la pénurie de personnel est là encore pour les 7 prochaines années. « Malheureusement, il n’y a pas de solution miracle pour remédier à cet épineux problème », croit Josée Marcotte, présidente d’Émergence, une firme de consultation en gestion des ressources humaines, développement organisationnel et specialisée en recrutement, formation et coaching professionnel. 

Entretemps, les entreprises aspirent à poursuivre leur développement axé sur la performance et les résultats. Plus que jamais, les employeurs devront continuer à faire preuve « d’adaptabilité », soit la capacité d’adaptation aux situations et aux personnes et ce, avec une ouverture d’esprit et une certaine résilience. Car le changement avec un grand C, apparait inéluctable pour les prochaines années. 

1. Management des talents par la personnalisation de l'offre

Au Québec et dans plusieurs sociétés industrialisées, l’attraction et la rétention du personnel est un enjeu d’affaires, selon Michel Maletto. Tout un défi. Car, comment attirer et retenir chaque talent dans un tel contexte? Il faut être créatif, évalue Josée Marcotte. « Aujourd’hui, l’employé.e désire que son employeur réponde à ses besoins et celui-ci doit tendre à personnaliser son offre pour attirer et retenir chaque talent. » 

De là, l’importance de réviser le plan de l’assurance collective et peut-être proposer davantage de choix à l’instar d’un menu à la carte. Dans une équipe, un.e célibataire de 32 ans n’a peut-être pas les mêmes besoins qu’une parent de trois enfants. 

Le salaire a-t-il une incidence sur le rôle d’attraction et de rétention du personnel ? « Oui, le salaire joue définitivement un rôle, mais ce n’est pas le seul facteur. Aujourd’hui l’épanouissement au travail et l’équilibre prennent davantage d’importance », observe Mme Marcotte.

2. Management hybride à l’ère de la déconnexion 

Actuellement, le travail hybride créé certaines tensions dans les organisations. « Chose certaine, une équipe qui vient d’embaucher du nouveau personnel doit se voir plus régulièrement afin de parvenir à une consolidation alors qu’une autre, très solidarisée, en a moins besoin », précise le président de la firme Maletto & Associés qui accompagne les entreprises lors du bilan organisationnel, mobilisation du personnel, gestion du changement. 

Citant l’adage « Loin des yeux, loin du cœur », Josée Marcotte estime que trop de journées en solo à la maison peuvent causer des effets néfastes comme un roulement de personnel. « Le télétravail est bien sûr plus productif, mais il ne suscite pas de sentiment d’appartenance envers l’équipe », dit-elle en suggérant de prendre des moyens ou activités afin de recréer virtuellement l’espace de la machine à café. Le but est de se détendre et rire ensemble. Cette convivialité développera peu à peu le sentiment d’appartenance envers l’entreprise. 

« Le secret pour alimenter le sentiment d’appartenance réside dans la fréquence des communications. Le gestionnaire s’assure de créer une cohésion d’équipe en créant des liens entre les membres de son équipe.»

En réunion, le gestionnaire pourra dire par exemple : 
- As-tu pensé à demander à ta collègue X : elle a une expertise dans ce domaine?

Mme Marcotte favorise l’adoption de saines habitudes comme la déconnexion. « Chez nous, nos clients sont avertis : on ne dérange pas les consultants après 18 h, à moins d’une extrême urgence. Tous ont droit au repos en soirée. » 

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3. Management des compétences et savoir numérique 

Au milieu des années 80, lorsque les employé.e.s apprenaient un nouveau métier, la durée de vie de leurs compétences techniques était d’environ 30 ans. « Aujourd’hui, une compétence dure environ 24 mois. Les gens doivent se réinventer par un apprentissage soutenu en matière de littératie numérique. Le contexte dans les manufactures exige rapidité et précision », explique Josée Marcotte. 

Une grande majorité des usines, en quête de personnel, optent pour la robotisation ou encore l’informatisation des opérations. « Malheureusement, il y a un problème de littératie numérique chez les gens plus âgé.e.s ou immigrant.e.s nouvellement arrivé.e.s », note M. Maletto. 

Cette incompréhension des outils numériques suscite souvent la peur et l’anxiété. À tel point que certains disent « je ne serai pas capable et je pense cesser de travailler », explique-t-il. 

La solution

Heureusement, M. Maletto voit que les entreprises ont recours à des outils ludiques afin de mieux entreprendre ce virage numérique du 4.0 en entreprise. Une autre façon de surmonter le problème est de créer un climat de confiance avec l’employé.e.
 -Es-tu capable de réaliser telle tâche ? « Ce n’est pas grave, on va te montrer comment », cite-t-il en exemple. 

4. Management humain pour grandir avec les employé.e.s 

Enfin, au cours des prochains mois et années, les employeurs doivent tenir compte de la diversité en entreprise. Concrètement, cela signifie l’intégration des nouveaux arrivants et prendre aussi en considération le phénomène Me too, la représentation de la diversité sous toutes ses formes ou encore le rapport hommes-femmes dans l’entreprise. « Si on veut mobiliser le personnel et créer un bon climat de travail, les nouveaux managers ne peuvent pas dire : je ne m’occupe pas de ces enjeux, bien au contraire », fait valoir M. Malletto. 

Aujourd’hui, la tendance n’est plus au « working » soit le travail traditionnel : travailler, livrer et être payé en retour. Ce mot est désormais banni et remplacé par « growing » ou grandir. 

 « Tout le monde doit grandir ensemble : les employé.e.s, l’entreprise, les clients, les fournisseurs et aussi les investisseurs. Tous et toutes s’enrichissent : et pas seulement sur le plan financier, mais sur le plan humain », dit Michel Maletto. Enfin, il conclut que les dirigeant.e.s et gestionnaires doivent témoigner de leur vision, de leurs actions et valeurs.

Devenir de meilleurs êtres humains

De son côté, Josée Marcotte estime que l’employeur doit encourager plus que la formation professionnelle. « Aujourd’hui, cela va plus loin : les dirigeants et gestionnaires d’entreprise veillent aussi au développement sur le plan humain. « Voyez-vous, nous ne sommes pas juste des travailleurs.ses. Si on grandit comme être humain, on devient forcément une meilleure personne.»

Mme Marcotte rappelle qu’une entreprise est formée de gens qui ont des attitudes gagnantes comme l’autonomie, le leadership, la proactivité. « En aidant les gens à développer leur savoir-être, nous allons grandir ensemble », pense-t-elle.

5. Management inspirant et le bien-être du personnel 

En janvier 2022, en plein confinement, les spécialistes en ressources humaines déploraient le haut niveau d’anxiété, de stress et d’épuisement vécus par les employé.e.s au Québec. Qu’en est-il neuf mois plus tard ? 

Chaque personne est responsable de son bonheur, croit Josée Marcotte. Toutefois, quelqu’un dans l’entreprise peut cependant contribuer à mettre en place des conditions favorables comme le respect du temps de repos, de la déconnexion. 

« Ce qui fait la différence, ajoute-t-elle, ce n’est pas un cours de yoga ou l’accès à une table de baby-foot. L’important, c’est la façon dont on traite les gens et comment on les implique dans nos décisions dans la vie de tous les jours. »

En se sentant impliqué dans l’entreprise, le personnel y trouve un sens et un engagement. Si en plus, les employé.e.s éprouvent du plaisir avec leurs collègues, cela créé un impact positif sur la motivation et diminue grandement les risques d’épuisement, selon M. Maletto. Le but est de permettre à l’entreprise de grandir avec le personnel et de se démarquer par sa contribution dans la communauté. Un beau défi pour les prochains mois.