La diversité chez Hydro-Quebec : De la parole aux actes

19-05-2021
« Il nous faut combattre aussi des idées en interne qui veulent faire croire que pour des chiffres, on recrute n’importe qui, alors que c’est faux ».
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Mourad Hachid, FCCQ
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La diversité chez Hydro-Quebec : De la parole aux actes

Hydro-Québec est l’un des plus importants employeurs au Québec, avec près de 20 000 salariés, dont près de la moitié est associé à la mission de base, qui est l’exploitation et 60% sont des métiers liés à l’entretien du réseau. Depuis quelques années, le cap a été mis sur la promotion de la diversité interne. C’est ainsi que le nombre de travailleurs issus des minorités a connu une croissance importante bien qu’encore insuffisante, qui fait dire à Mme Anne-Marie Thibault, Conseillère Équité, diversité et inclusion à Hydro Québec, que la diversité au sein du groupe évolue positivement d’année en année et qu’elle a connu un vrai coup d’accélérateur avec l’arrivée de la nouvelle PDG, Mme Sophie Brochu. 

Selon le tableau de bord présenté par Mme Thibault, il ressort qu’en 2020, les femmes représentent environ 28% du personnel, les autochtones un peu moins de 2%, surtout dans le nord, où se trouve les grands ouvrages près de leurs communautés, les personnes en situation de handicap sont très peu représentées, avec moins de 1% et les minorités visibles et ethniques ont connu une progression très nette, passant de 5,4 en 2015 aujourd’hui à 9,3%. Le taux de représentativité des minorités visibles est un peu plus important dans les grands centres urbains, à l’image de Montréal où les travailleurs issus de ces minorités représentent près de 18%. Pour Mme Thibault, ce n’est, certes « pas assez, mais c’est le groupe qui a connu la progression la plus marquée ces dernières années ».

Cette situation s’explique en partie par le fait que, « jusqu’à il y a cinq ans, la volonté de la haute direction, n’était pas aussi claire pour l’intégration de ces travailleurs issus de l’immigration ou des communautés ethnoculturelles. Avec l’arrivée d’une nouvelle direction, à sa tête M. Éric Martel, les choses ont commencé à changer. M. Martel a ouvert des pistes et des canaux qui n’étaient pas ouverts avant », constate Mme Thibault, qui précise en outre que, du fait que cette catégorie d’employés est relativement récente au sein de l’organisation, il faut « que ces personnes puissent cheminer, évoluer au sein de l’entreprise, démontrer tous leurs talents ». Au niveau de la catégorie des cadres, qui sont près de 2 000 dans l’entreprise, les minorités ethnoculturelles ont connu la plus importante évolution de ces cinq dernières années, comparativement à la catégorie des femmes, qui représentent environ 26%.

 

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Dans la pyramide des emplois de gestion, 60% de tous les postes de gestion sont de 1er niveau et généralement associés aux activités de base.  Ces gestionnaires dirigent les équipes de monteurs de lignes, les électriciens d’appareillages, etc. Comme il y a peu de femmes dans ces postes-là, il y a peu de femmes occupent ces postes de gestion, alors que dans les échelons supérieurs, elles sont plus présentes. Selon notre interlocutrice, l’arrivée, il y a plus d’une année de la nouvelle PDG, Sophie Brochu, a créé un véritable levier de croissance pour la diversité au sein de l’entreprise. Dans toutes ses sorties, la nouvelle PDG ne rate aucune occasion pour mettre la diversité au centre de ses préoccupations. Cette position de la nouvelle PDG envoie des signaux forts sur le positionnement d’Hydro Québec au sujet de la diversité, ce qui permet d’attirer de nouveaux talents et de nouvelles compétences issues des minorités, convaincues de pouvoir accéder à des emplois de haut niveau. « Je peux vous dire qu’il y a vraiment quelque chose qui a bougé, un vrai changement que tout le monde ressent », avoue Mme Thibault.

Chez Hydro Québec, la politique de promotion de la diversité ne s’articule pas autour d’une quelconque nécessité d’atteindre des chiffres, parce que cela pourrait être contreproductif à certains égards, dit-on. « On est à la recherche des meilleurs talents, mais on ne va pas privilégier une catégorie vis-à-vis d’une autre, juste pour atteindre des chiffres » nous dit Mme Thibault, qui insiste sur la nécessité de travailler à éliminer les préjugés, les obstacles et les biais au cours des processus de recrutement. Pour elle, tout le monde doit comprendre que la décision d’embauche est prise sur le meilleur talent, quelle que soit l’origine, la couleur, le sexe, que la ressource soit en fauteuil roulant ou voilée. « Il nous faut combattre aussi des idées à l’interne qui veulent faire croire que pour des chiffres, on recrute n’importe qui, alors que c’est faux. Mais à compétences égales, on prendra des personnes issues de groupes sous représentés jusqu’à ce que les écarts se comblent », affirme notre interlocutrice.

L’entreprise a mis en place, il y a de cela un peu plus de quatre ans, un programme de parrainage professionnel pour les nouveaux arrivants, qui a touché jusqu’à 100 personnes cette année. Selon, Mme Thibault, le taux de rétention en entreprise est de 68 %. Le programme, qui dure 30 semaines, est destiné aux immigrants qui sont au Québec depuis moins de 5 ans, qui sont à leur première expérience professionnelle dans leur domaine de compétence. L’objectif est d’arriver à mettre ces personnes dans des emplois en adéquation avec leurs domaines d’expertise. Un autre objectif de ce programme est de permettre aux employés de côtoyer, découvrir et apprécier le talent qui vient de l’extérieur et par ricochet « arrêter de le craindre ». 

Un deuxième programme a été lancé quasiment au même moment et s’articule autour de stages d’été pour les étudiants en situation de handicap. Selon notre interlocutrice, tout est fait pour que le programme aboutisse à donner des emplois à ces étudiants, une fois gradués. « Nous avons la conviction que nous gagnerons, comme entreprise, à être davantage inclusif.  Ces ressources ont beaucoup à nous apporter ». À côté de cela, un autre programme, actuellement en pilote touche les personnes en situation de handicap, peu ou pas scolarisées. « C’est de notre responsabilité sociale de leur faire une place », précise Mme Thibault, avant de parler du projet de certification pour assurer des pratiques plus inclusives envers les autochtones.

De nombreux défis attendent Hydro Québec, qui avance doucement, mais surement vers un environnement plus inclusif, avec cette conviction que la réussite passe aussi par les diversités des talents, la diversité des idées, même si ce n’est pas toujours facile. 

Quelques pistes d’inspiration de pratiques mises en place par Hydro-Québec :

  • Création de groupes d’affinités : Les employés de différentes origines ethnoculturelles sont réunis dans un groupe appelé HQultures. Il y a un groupe qui réunit les personnes de la communauté LGBTQ+ et ses alliés. Ce sont des groupes qui offrent des occasions de rencontres entre employés, mais aussi qui ont pour mandat de recommander des avenues à l’entreprise et de ce fait agir comme un accélérateur de l’inclusion. Le groupe LGBTQ+ aussi réuni des organisations externes pour mettre en commun les bonnes pratiques et ainsi aller plus vite et plus loin.
  • Sensibilisation des équipes. Chez Hydro-Québec ce sont 90 % des gestionnaires qui ont été sensibilisés aux biais inconscients. Il est important de faire comprendre aux gestionnaires, qu’avant de prendre des décisions, il faut réfléchir aux répercussions que les biais peuvent avoir sur les autres et surtout sur les minorités.
  • Création de liens entre les groupes sous-représentés et les membres de l’exécutif. Chaque groupe sous représenté est dorénavant associé à un exécutif du comité de direction. Ce dispositif permet de sensibiliser et mettre à contribution davantage des ressources influentes.